La belle aux citrons blancs

11.6.10

image Juillet. Le mois des vacances, du soleil, de la flânerie et surtout des estivantes qui débarquent au village. J’ai quinze ans, l’acné pubère bien installé et les hormones joyeuses qui titillent avec insistance mon corps d’adolescent. Premiers émois en vue, j’observe avec attention les jolies étrangères fraîchement arrivées et que le soleil du Sud a encore épargnées. Visages diaphanes et corps laiteux, elles se promènent dans le village en mission de reconnaissance. Nous, les villageois attablés à la terrasse du café tels des animaux en rut, les regardons passer et se pavaner en roucoulades estivales. Quelques-unes ont déjà rosi et petites écrevisses sous leurs lunettes noires nous dévisagent de leurs mirettes avides. C’est le signal du début de la saison. La pêche est ouverte et bien que celle de l’écrevisse soit interdite dans nos rivières, nous sommes bien décidés à « pêcho » notre première Parisienne, Marseillaise voire Nantaise. Aucun de nous n’est vraiment sectaire.

Elles logent pour la plupart sous des tentes, dans le camping perché sur la colline qui surplombe le petit bourg. La nuit venue, munis de nos lampes-torches, c’est une armée de mobylettes hurlantes qui monte épier les demoiselles. Nous arrêtons nos engins à quelques centaines de mètres pour ne pas éveiller l’attention et nous terminons notre approche en file indienne silencieuse. Planqués derrière un talus de terre aux abords du camping, nous éteignons nos lampes et scrutons les tentes éclairées à la recherche d’une ombre chinoise affriolante. Les chuchotements de l’un emportent la colère de l’autre et les voix qui se voulaient discrètes finissent inévitablement par attirer l’attention. Mais sommes-nous vraiment venus jusqu’ici pour ne pas se faire remarquer ? A l’évidence non et le réveil de la demoiselle va en ravir quelques-uns.

D’abord un cri dans l’obscurité nous interpelle. Une voix aiguë monte d’une des tentes cherchant la cause à ce dérangement soudain. Nous baissons tous nos têtes sous le talus et le silence dans nos rangs est total. Seuls quelques rires contenus se partagent dans nos regards gentiment apeurés. Mon pouls s’accélère et je sens près de moi que l’adrénaline de mes camarades est semblable à la mienne, en forte progression face à la transgression. Puis la tente s’ouvre et se referme aussitôt dans un double sifflement rapide du zip de sa fermeture. Des pas moelleux glissent sur la terre glaise et se rapprochent de nous avec de petits claquements caractéristiques de la paire de tongs brésiliens. Personne n’ose lever la tête puis les tongs se taisent et une tête ronde tout sourire passe au-dessus du talus et nous surprend accroupis, tenaillés par l'angoisse. Honteux, nous sortons de notre cachette, le rouge aux joues bien heureusement masqué par la pénombre. Devant nous, fière de sa découverte, une grande perche aux longs cheveux noirs, une fille, une vraie, d’au moins vingt ans, nous toise d’un regard malicieux.

Ne pouvant pas tenir devant le malaise, certains se carapatent et rejoignent leurs mobylettes qui très vite crachent leur pétarade dans la vallée. Nous restons seulement trois garnements dépités devant elle, beauté divine qui nous dévisage. Penauds, nous exprimons maladroitement nos excuses tandis que nos pieds se rejoignent à leurs extrémités nous conférant une posture idiote accentuée par nos mains qui batifolent sans savoir où se poser sur nos corps. Elle, superbe, sourit toujours de satisfaction et tarde à nous adresser la parole, comme si elle savourait sa prise et la gêne dans laquelle elle nous a installés. Mais bon dieu qu’elle est belle ! Nos lampes-torches l’éclairent maintenant parfaitement. Entre les tongs, sont calés deux magnifiques pieds grecs aux doigts peints de rouge foncé et si l’on remonte longuement ses fines jambes qui n’en finissent pas d’être des jambes, nous tombons sur un bassin (certainement parisien) dont la largeur parfaite laisse entrevoir, en son arrière, une paire de fesses bombées à damner tous les garçons du village. Plus haut, parce qu’inévitablement nos regards montent plus hauts, deux merveilleux petits seins ovales surplombent l’ensemble et le t-shirt blanc qui les plaquent a du mal à masquer les petits tétons excités par la douceur de la nuit ; à moins que cette érection ne soit provoquée par notre présence.

Nous restons encore quelques minutes plantés là devant elle, hagards, déconfits comme des puceaux peuvent l’être. Une douce éternité durant laquelle le sang et nos sens virevoltent dans nos corps, pressant nos bas ventres de libérer la bête qui sommeille en nous depuis toujours. Et soudain sans crier gare, sans dire un mot, la voilà qui lève son t-shirt et dévoile l’objet de notre commune attention. Ils sont devant nous, deux gros citrons blancs, fermes et dressés dans la nuit comme d’improbables friandises bénies des dieux. « Allez-y, touchez si vous voulez ! » nous invite-t-elle d’un air mutin. Nous regardons nos mains folles qui rejoignent dans un croisement de doigts l’arrière de nos têtes comme pour mieux appuyer notre surprise. Puis elle se rapproche lentement de nos visages et d’une ondulation gracieuse du torse, frotte lascivement sa poitrine sur nos visages confondus. Pétrifiés, nous fermons nos yeux pour apprécier l’offrande alors que l’entrecuisse de nos shorts se tend au passage doux des mamelles sur nos bouches. Ses yeux exorbités nous fixent pour mieux nous happer et tandis que sa langue glisse sur ses lèvres pulpeuses, elle jette un dernier regard sur nos parties intimes, baisse son t-shirt et s’enfuit en éclatant de rire nous laissant pauvres et jeunes cons dégoulinant d’excitation.

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