Puisqu’il en est ainsi

22.10.10

image Puisqu’il en est ainsi, dit-elle sur l’écran.

Cachée derrière ses lunettes noires, elle se grime, ajuste son maquillage, remet un peu de rouge feu sur ses lèvres, des lèvres que j’ai tant embrassées. Puisqu’il en est ainsi, la laisser s’enfuir, repartir à zéro, retrouver son reflet dans le miroir, séduire pour vaincre les contradictions, contradictions que j’ai tant aimées.  Puisqu’il en est ainsi, se suffire du « en » qui englobe le tout, les années suspendues, ballottées par le souffle de la vie et balayées aujourd’hui par l’inertie, victimes de la nonchalance que je supposais assumée et partagée.

Puisqu’il en est ainsi, dit-elle sur l’écran.

Derrière le filtre, elle se rassure, tient la barre haut, refuse tous les dévers, pentes nécessaires qu’elle croyait piège. Puisqu’il en est ainsi, me protéger de l’image charme, retenir nos discours si précieux et dans d’autres eaux larguer les amarres, attaches qu’il serait vain de vouloir renouer. Puisqu’il en est ainsi, réapprendre à rêver, s’offrir au temps dans des parenthèses enjouées, lunaire comme j’aimais l’être avec elle. Puisqu’il en est ainsi, savoir que le sentiment était partagé, qu’il l’est toujours peut-être, ces peut-être que j’ai trop prolongés. Puisqu’il en est ainsi, respirer encore les fragrances de son absence, un instant, pour se dire que c’est arrivé, puis se résigner à continuer seul vers des états meilleurs, le meilleur de moi, d’un nous futur équilibré qu’un jour avec elle j’ai touché. Puisqu’il en est ainsi, l’envelopper déjà du souvenir, persistances à paraître dans le futile, fut-il, furent-ils.

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