Clin d’œil

29.11.10

image Je me souviens des mercredis après-midis dans la salle du foyer rural. Grande vide et froide, nous venions là, une dizaine d’amis, préparer la soirée du samedi. Une fois par mois, au foyer rural, il y avait LE bal. La mairie prêtait la salle - peut être la louait-elle, je ne sais plus - à l’association « Clin d’œil ». « Clin d’œil » c’était Jean Michel, Thierry et les autres. Et puis, moi, un peu groupie des grands qui étaient aux commandes de l’aventure. Car c’était une aventure dans les années quatre-vingt de monter une association et de la faire vivre. Alors, ils faisaient appel à nous, les bénévoles désœuvrés du mercredi, pour donner mains fortes. Il fallait faire les affiches, les photocopier, puis parcourir les rues et les villages aux alentours pour les coller sur les murs ou les agrafer aux platanes. La tournée terminée, nous passions au troquet du coin pour en parler : « Hey, tu viens toi au bal samedi hein ? Ça va être terrible, tu verras ! ».

Mais « Clin d’œil », c’était avant tout une disco-mobile : la discothèque itinérante de la région. Deux platines, une table de mixage et deux grosses enceintes remplies de watts. Le reste était fait maison, une caisse noire en contre-plaqué pour embarquer le matos qui, coté face, servait de décor pour masquer fils et rallonges, double prises et fatras divers du DJ. Et le Disc-Jockey, c’était Jean-mi, le seul maître à bord, la tête penchée sur les vinyles et le casque autour du cou. Il tapait du pied et enchaînait les tubes du moment, il était fier derrière son micro : « mmmmm, bonsoir et bienvenue ! Ce soir avec l’équipe de la disco-mobile clin d’œil, nous allons vous faire passer une nuit de folie. Est-ce que ça va ? » hurlait-il en ajoutant un peu de réverb. à la fin de chaque phrase. Il était toujours accompagné de son light-jockey qui balayait la piste à coup de spots multicolores et dégingandait les danseurs avec son stroboscope à décoller les rétines. Les débuts de soirée avec « Clin d’œil » étaient composés de grands moments d’émotion avec notamment l’intro de « 2001 l’odyssée de l’espace » pendant que la boule à facettes géante crachait ses mille copeaux de lumière. En suivant et sans un temps de répit, les tubes rocks, new wave et smili-punks se succédaient sur le dance-floor en ébullition. A chaque soirée, il y avait une ou plusieurs découvertes de Jean-mi, les imports comme il les appelait, maxi 45 tours directement venus des states ou d’Angleterre, petites perles qui n’étaient pas encore sortis en France et dont « Clin d’œil » nous donnait la primeur. Il n’était pas rare que nous passions à côté de la super-exclu-lulu, peut être trop vendue par l’animateur, d’un avant-gardisme ricain qui nous dépassait ou simplement parce que le titre n’était pas bon du tout.

La soirée retombait vers une heure du matin avec une série de slows romantiques. Nous tournions une dernière fois arrosés de néons violets qui faisaient ressortir les grains de poussière déposés sur nos vêtements. L’équipe remballait le matériel, nous nettoyions la salle et déjà se préparait la nuit d’enfer du mois suivant.

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