La femme au balcon XLIII

4.5.22

Le camion poubelle vient de passer lentement entre les murs. Il a gobé nos déchets, glouton de métal, avec le fracas de ses entrailles comme appel au jour de vraiment se réveiller. Ce n’est pas agréable un tel raffut dès le matin alors que les yeux n’ont pas encore suffisamment grossi pour accepter la lumière. 
Et c’est avec les paupières encore lourdes que tu es apparue dans l’encadrement de la fenêtre, le regard perdu sur le cul du camion qui s’enfuit. J’ai bien senti à ta moue que le bruit de la grande mâchoire de fer t’avait réveillée. Tu as dégluti une gorgée de café, allumé ta cigarette avec une contrariété que j’avais rarement vu sur tes lèvres.  Puis le silence est venu caresser ta joue. Au loin, le son lourd du camion s’étouffait.
Tu as écrasé ton premier mégot dans le cendrier. Tu as fait les yeux doux à une pensée qui t’a traversée et tu as fini par sourire à je ne sais quoi, chassant le camion qui grondait encore dans ma tête.

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