Chère application - 10 novembre

10.11.22

Chère application,

La nuit a mis ses pantoufles, sa robe de chambre et boit son café noir, très noir. Son regard plein d’elle-même, son silence accoudé à la table, sa tête ronde et grosse, son air abattu et la perfidie de son sourire, tout cela me fait dire qu’elle a passé une mauvaise elle-même. Qu’un mauvais rêve l’a dérangée du dedans. 

Des serpents à tête d’œuf, un cerbère à double-queue, une mare truffée d’énormes poissons-chats aussi écaillés que velus, des arbres autour, maigres et nus sur un désert de sable brun ; tel devait être le décor de la nuit de la nuit. 

Heureux, voilà le jour avec son maquillage d’existence parfaite. Sa face sombre sous un fond vert, les aspérités et accrocs de la nuit passés à la gomme, les peintures refaites à neuf, le paysage découpé dans la dernière photo Instagram à la mode et les lumières lissées par le grand logiciel de retouches terminent le tableau d’une touche impressionniste. 
La nuit peut se retirer d’elle-même en emportant monstres et ténèbres. Les applications s’occupent de tout.

Bon courage, chère application.

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