Sous cette après-midi d’été

19.7.10

image Soleil au zénith, chaleur harassante, sous ton léger chemisier blanc s’impose la moiteur persistante de ta peau violacée. Écume uniforme qui enveloppe ton corps et ton esprit au doux son des cigales. Trop chaud. Tu fermes les baies, abats les volets, ourles sans bruit la paresse des après-midi d’été. Même calfeutrée, l’astre inquisiteur perce les murs et leste de son plomb invisible ta tête fatiguée ; la léthargie t’étreint, tu la laisses entrer. Tes mouvements d’abord résistants sont maintenant saccadés et difficiles, l’inertie s’installe en volutes étouffées et toute action devient impossible. Seuls persistent quelques flottements de poitrine pour expulser la chaleur qui t’oppresse. Tu traînes ton squelette, paupières basses et sueur en corolle sur ton front, tu ne parles plus, tout juste détaches-tu quelques mots pour expliquer cette langueur soudaine. Fantôme ouaté, ton corps se découpe dans le chatoiement des persiennes. Ombre et lumière, tu deviens floue dans les vapeurs évanescentes du carrelage brûlant.

Lentement tu avances, tires sur tes jambes pour arriver à marcher. Lymphatique, tu caresses le sol de tes pieds nus puis t'alanguis sur un fauteuil trop moelleux. Tes cuisses collent au tissu, tu tires sur ton chemisier et recouvre tes genoux pour faire paroi étanche à la désagréable sudation puis remontes tes talons sur l’assise. Ainsi accroupie, un courant d’air léger circule sous ton corps, une douce fraîcheur éphémère, un répit qui apaise ta peau. Tu fermes les yeux, humecte tes lèvres séchées et lasse, tu laisses le sommeil te parcourir. Ta tête dandine, elle se désarticule mollement et tombe sur tes rotules. Tu t’endors. Je te regarde, tu es belle ainsi revenue dans une position fœtale. Tu ne me vois plus, tu dors profondément malgré la situation inconfortable. J’ai chaud. Aussi. Personne ne voudrait te déranger et pourtant j’ai envie de te réveiller.

Je me glisserais derrière toi, poserais mes mains sur ta nuque chaude et appliquerais mes pouces sur tes cervicales contractées. D’un trajet circulaire, je tracerais ton cou, tes épaules puis promènerais mes paumes vers le bas pour découvrir ton dos brillant. J’effleurerais puis remonterais de tes hanches à tes aisselles. Mes mains te sillonneraient, friseraient tes seins et renoueraient avec ton cou pour, de quelques doigtés, le délier. J’alternerais, échine, nuque, épaules, hanches, frôlement de poitrine puis clopinerais sur ta colonne vertébrale, dénombrerais de mon index tes petits os ronds, replierais légèrement ta peau dans leur cavité. Et je recommencerais. Tu serais réveillée mais ne le dirais pas. Juste quelques phonèmes de plaisir sortiraient de ta gorge, soupirs qui me diraient que tu sais, que tu sens, que tu as envie. Tu me laisserais encore un instant parcourir ton corps puis tu te lèverais, aérienne, tu te dirigerais vers la chambre. Un léger regard en arrière pour m’intimer de te suivre et je te suivrais, sous cette après midi d’été.

Illustration

Texte publié initialement sur le blog de Kathie DURAND, de minette à ferraille, dans le cadre des vases communicants du mois de juillet.

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