Le miroir des autres 55

Il y a le miroir et la fine pellicule de verre qui sépare le monde en deux.


Chère application,

Je t’écris depuis le miroir des Autres dans lequel je vis, désormais. Je m’assimile peu à peu, au prix de quelques sacrifices mais les autres Autres sont gentils. Je vais bien et ne regrette pas le voyage. 
Cunégonde, Théophile et Philémon sont mes Autres préférées. Ils me disent que je suis des leurs. Je suis un Autre. Du moins me considèrent-ils ainsi. Leur empathie me touche. Mon parcours d’entrée se passe bien. Je me sentirais faisant partie entière de leur communauté lorsque je pourrais bouger mes oreilles et mes narines en même temps. C’est une des conditions sine qua non pour rester dans le Miroir. 
Je te vois hausser les sourcils. C’est stupide vu de ton coté mais ici, c’est pris très au sérieux. 
Ils m’ont laissé t’écrire mais ce sera la dernière fois. Ils préfèrent ne pas. Ils préfèrent ne plus communiquer avec l’autre côté du Miroir. Alors, avant que tout se referme, je souhaite simplement te remercier pour ton aide lorsque les choses avec les Autres n’étaient pas simples, puis te rassurer aussi. Tout va bien. 

Je te remue les lobes et t’embrasse du bout du nez, chère application. 


La fine pellicule de verre lentement s’opacifie, le miroir de la salle de bains perd son teint. 
Miroir blanc, grège, gris, étain, noir.
  • 22.1.23

Le miroir des autres 54

Un paysage, en ses longueurs, largeurs, circonférences, identique. De la lumière, un nombre suffisant d’heures. La nuit en ses variations douces dans la même attitude mystérieuse. Les Autres, des gens comme les autres.

Je cherche la différence mais ne trouve pas. L’air n’est ni plus ni moins respirable. Les odeurs me parviennent en quantité et qualité équivalentes. La vie semble ici conforme à celle que je connais là-bas, de votre côté du miroir.  

Les Autres m’ont accueilli avec bienveillance. Je commence aujourd’hui mon parcours d’intégration. J’entends des sons, inintelligibles pour l’instant, mais il parait que bientôt, je comprendrai. « Tu verras quand tu seras plus grand » m’a-t-On dit. Je ne sais pas qui est ce On et ce qu’On a voulu dire. 
  1. Je recommence ici unenouvelle vie, m’a-t-On dit.
  • 21.1.23

Le miroir des autres 53

Des ombres dans le couloir,
à guetter ma sortie. 
Je longe un mur de glace
d’où coule un ruisseau.

Rien n’est changé
mais tout se meut. 
Je voyage dans l’espace
à la recherche d’un miroir. 

À la vitesse des ombres
qui me tirent le visage,
le ruisseau devient fleuve,
le mur banquise. 

Au fond du salon le pôle, 
Sud ou Nord je le perds. 
Les Autres alignés
comme des pingouins m’attendent. 

Je suis arrivé dans le miroir.
  • 20.1.23

Le miroir des autres 52

Le miroir ne démarre pas. Il s’allume bien mais ne démarre pas. J’ai bien un paysage : une colline verte avec un ciel bleu dans lequel on devine un nuage ou du moins la traînée d’un nuage. C’est rapide, ça clignote et le paysage disparaît puis, plus rien, miroir noir, miroir bleu en boucle. 

Le miroir plante et les Autres attendent de démarrer la journée dans un recoin froid de l’univers. J’attends aussi. 

Il ne faut pas que je perde le ConTRôLe : hALTe à la panique, SUPPrime tes peurs, Christophe ! La solution est sous tes yeux. Ton reflet va revenir.
  • 19.1.23

Le miroir des autres 51

Les Autres sont des loutres dans un bassin inaccessible. Des bêtes mignonnes avec la peau visqueuse. De ces êtres mi-anges, mi-démons. Dans mon reflet je vois le vertige des espèces, l’homme dans son infinie petitesse aussi beau et vilain qu’une loutre. 

Mal peigné, les dents et les moustaches qui dépassent des visages, se crée un déséquilibre dans l’esthétique de l’image. Je ne compte plus les réajustements de mon corps dans l’espace. Les simagrées de mes prochains. Les Autres sont des bêtes, des loutres qui plongent dans le miroir de ma salle de bains, dans un liquide visqueux et saumâtre. Je suis l’outre.
  • 18.1.23

Le miroir des autres 50

Je fais des ronds sur la vitre, des ronds des O avec la buée pour écran noir de mes nuits blanches. Nougaro glisse sa voix sur le miroir, joue avec mes pensées. 
Je l’ai peu écouté, Nou-ga-ro, et voilà qu’il s’invite. J’ai lu quelques-uns de ses textes ces derniers jours, les ai enregistrés à la volée, ma voix parlée sur ses mots. On a le sud en commun, ça s’arrête là. Mé-lo-pée. 

Dans le miroir, les Autres s’agitent, swinguent sur Armstrong. Non, ils ne sont pas tristes. Noir de peau et muets jusque dans leurs gestes, ils disent la nuit blanche.

Je fais des ronds sur la vitre. Des O, des Oh Ooooh, des longs, des saccadés avec dans la tête la voix de Nougaro.
  • 17.1.23

Le miroir des autres 49

Les Autres ne me parlent plus. Ils ne tenaient pas de longues conversations mais, çà et là, ils lâchaient une interjection, un Oui, un Oh, un Ah. C’était peu mais j’étais rassuré. Je ne parlais pas seul devant mon miroir. Je pouvais continuer à croire que tout ceci n’était pas une hallucination. 

Je parle et ne répondent pas. Comme s’ils étaient subitement devenus sourds. J’ai envisagé cette hypothèse lorsque je me suis souvenu avoir changé de nettoyant pour le miroir. Un nouveau produit vanté en tête de gondole pour son efficacité, en promotion et à l’odeur agréable. Une seule pulvérisation les aura  privés de tous les sens. C’est ennuyeux. 

- Non, on t’entend ! C’est juste que l’on n’a pas envie de te répondre. On préférerait ne pas avoir à le faire, désormais. 
- …
  • 16.1.23

Le miroir des autres 48

Je déborde du miroir par petites flaques. Le miroir est une mer calme, une belle Méditerranée, même s’il n’en a pas la couleur. Cette mer est émeraude ou bien vert bouteille. Je n’ai jamais rien compris aux nuances de couleurs, pas plus qu’aux couleurs tout court. La mer est verte dans le miroir ou bleu très foncé ou rouge avec des reflets de visages. 

Je déborde, je suis une flaque sur une psyché. Les autres sont des migrants. Je suis leur élément bohème, leur reflet et flatte ma bonne conscience. Je ne parle jamais de sujets de société ou de drames humains aux Autres, pas plus qu’aux autres qui ne sont pas Autres.

La mer : s’il fait beau aujourd’hui, je sors les Autres du miroir et on va voir la mer, la calme, la vraie.
  • 15.1.23

Le miroir des autres 47

Je souffre d’effet mémoire. Ce phénomène physique mais aussi chimique intervient après une exposition trop longue à un miroir. Cela affecte mes pensées et mes rêves. 

Je suis une vieille batterie. Dans le miroir de la salle de bains, chaque matin, des Ions courent sur ma peau. Les Autres sont les Ions. Je suis une batterie à bout de souffle qui souffre d’effet mémoire, je la perds un peu plus chaque nuit. 

Je suis fait de chair, d’os et de lithium. Je dors avec une prise 25w reliée à un cordon USB-C. À 80%, le système général coupera l’alimentation pour me protéger. Les Autres y veillent. Les 20% restants seront pourvus lorsque je serai proche de l’éveil. Bientôt, je ne tiendrai plus. Pour l’instant, je dors.
  • 14.1.23

Le miroir des autres 46

J’étais tranquillement à l’intérieur de mon corps à nettoyer. Dans les artères, passais chiffon et coton tige pour les endroits inaccessibles. Je faisais le ménage dans mes boyaux. Pas une mince affaire. Plus de cinquante ans de digestions ont créé un capharnaüm dont je n’imaginais pas l’ampleur. Les monstruosités qui se trouvent là ! Je ne vous dis pas.

J’étais tranquillement à glisser sur l’intestin grêle comme sur un toboggan quand, soudain, les Autres ! À la sortie Est, après le rond-point, juste à gauche de ce qui sera dans quelques années mon cancer, voilà que je retrouve mes Autres, assis autour d’une table de ferme à ripailler comme de cochons : boudins noirs, saucissons, jambons variés, tripes, salaisons ésotériques, beurre, fromages à pâte tendre et coulante, l’odeur ! Puis du gros rouge à flots et du blanc sec direct au goulot… Et que ça chantait, gueulait, ivres d’être dans mon corps et libérés du miroir de la salle de bains

Je me lève ce matin avec de sacrés haut-le-cœur.
  • 13.1.23

Le miroir des autres 45

Le matin, survient souvent une de ces questions primordiales qui titille d’abord le corps puis l’esprit et ensuite peut-être, va savoir, tous les Saints qui nous écoutent planqués dans quelque grand autre miroir que le ciel cache sous son gros tapis de nuages.

La question du jour m’a pris vers cinq heures. Une allure de bateau vrombissant dans un port. Un voilier, un petit voilier, cahotant entre les ponts et les canaux. À son bord, un vieux capitaine (portrait du Captain Iglo pour les plus âgés d’entre vous qui visualisent le bonhomme s’agitant dans une publicité qui doit dater de quelques dizaines d’années),un fier capitaine qui filait droit vers le large avec, dans l’œil, l’expression de celui qui s’aperçoit à chaque aurore de la grandeur et du mystère à jamais irrésolus de la nature.

Voilà où j’en étais du cheminement de ma question existentielle lorsque les Autres dans le miroir de la salle de bains ont achevé de me réveiller dans un vacarme de tous les diables, Saints et marins pêcheurs de tout bord ! Philémon suçait sa pipe et braillait des chansons bretonnes. Théophile soufflait beaucoup trop fort dans un biniou. Et les autres Autres dansaient en ronde autour du duo.

J’ai pensé une dernière fois au Captain dans le creux de l’océan puis la question, la fameuse question, m’a filé entre les mains et les synapses comme un poisson frais bondissant de l’eau.
  • 12.1.23

Le miroir des autres 44

Je cours dans mon rêve à une vitesse vertigineuse. Le paysage défile d’un seul trait, ou plutôt il s’agit de bandes multicolores, striées et floues qui envoient de l’air pulsé. De sorte que je me trouve dans un canal bordé de deux bandes sur lesquelles soudain je me risque à glisser les mains.
J’y vais lentement, le bout des ongles d’abord pour vérifier que les stries ne brûlent ou ne coupent pas, puis la sensation déride mon visage, la douceur d’une eau vive quand je plonge la main, s’empare de moi. Je suis soulagé, je décélère, je trottine, je marche, les bandes coulent sur mes pieds, je m’arrête. 

J’allume le miroir. A l’intérieur une rivière, son clapotis et les Autres sur les berges qui tournent la tête vers moi. Je suis un peu essoufflé.
  • 11.1.23

Le miroir des autres 43

C̵h̵e̵r̵ j̵o̵u̵r̵n̵a̵l̵
Chère application,

Tout d’abord mes meilleurs vœux pour cette nouvelle année. Des semaines se sont écoulées depuis notre dernière correspondance. Ne m’en veux pas, je suis empêtré dans un problème qui dépasse l’entendement et n’ai vraiment plus la tête à moi. 

Je vois des gens dans le miroir de ma salle de bains. Alors, cela peut sembler abrupt et fou, tu pourrais te dire que je déraille, que la sénilité me gagne et tu aurais raison. Je te demande quand même d’y réfléchir à deux fois. 

Tu connais mon côté rationnel. Je n’oserais jamais t’écrire une telle chose si je n’avais vu ce phénomène se produire et reproduire  depuis plus de quarante jours. Tous les matins à peu après à l’heure où habituellement je t’écrivais, des gens, des Autres venus du futur ou du présent ou encore d’un espace temporel encore inconnu, que sais-je, débarquent dans ma salle de bains, l’habillent de mille reflets et évoluent dans le miroir de façon la plus incongrue. 

Voilà. Il fallait que je te le dise. Que tu me crois ou pas, j’espère que tu pourras m’aider soit directement, soit en faisant jouer tes relations cybernétiques. Il faut résoudre cette anomalie, que tu me trouves le bon logiciel, robot, application ou la dernière intelligence artificielle â la mode qui saura élucider mon problème. Je compte sur toi. 

Mes amitiés chaleureuses, chère application.
  • 10.1.23

Le miroir des autres 42

J’allume le miroir, redescend d’un étage les prétentions du jour. Cuné apparaît, me sourit (c’est la première fois, il me semble) fait un gros plan sur une porte puis disparaît. 

Un lundi ne peut pas être révolutionnaire. 
On n’a jamais vu de grands bouleversements géopolitiques, un lundi.

Théophile ouvre la porte agrandie par Cuné. Cette porte est située dans le fond du miroir près du café où les Autres ont l’habitude de se retrouver et donne au-delà du miroir, Autour de la porte, un ciel bleu. Je pense à Jim Carrey dans The Truman Show. Théophile me salue de la main, sourit (c’est la première fois, il me semble) puis disparaît. J’éteins le miroir. 

Je descends d’un étage, fait en quelque sorte une révolution dans la cage d’escalier, ouvre la porte de mon immeuble qui donne au-delà de moi. De l’autre côté, sans mystère, la rue longe un trottoir où les gens ont l’habitude de passer. La rue dans la pénombre du lundi, réelle à en pleurer.
  • 9.1.23

Le miroir des autres 41

Où l’on se demande (encore) si les Autres existent. 

Je suis le cheminement de la question dans ma tête jusqu’à ce que le rire intervienne. Car le rire intervient toujours. Il est le fusible. Il me permet de faire sauter les plombs sans que j’endommage le reste de mes fonctions vitales.

La question a fait plusieurs tours dans ma tête. Je me demande même si elle n’a pas toujours été là, tapie dans un coin, attendant que je maîtrise le langage, le raisonnement et le discernement requis pour éclore.
Qui sont les Autres ? Suis-je des leurs ou sont-ils un leurre ? Dans le miroir ou ailleurs, sont-ils réels ? 

Comme on peut le remarquer (Pour préserver sa santé, insère ici avant la virgule, un sourire de l’auteur), et on le remarque, la particularité de cette question est que, dès qu’elle est posée, elle génère d’autres questions en cascade qui, si je ne les arrête pas, défilent les unes après les autres dans le but d’affiner le propos, préciser, étayer, couper les cheveux à quatre, en somme m’emmerder ferme. 

Sont-ils de chair et d’os ? Leur reflet est-il un vrai reflet ? Ou une simulation fabriquée par une IA ?
Et si les Autres se posaient les mêmes questions à mon sujet ? Et s’ils n’existaient pas, dis-moi pourquoi j’existerais ? (Joe Dassin ou presque)
  • 8.1.23

Le miroir des autres 40

Au réveil, je me demande combien de gens je connais (même de loin) et de combien je suis capable de citer le nom. C’est amusant. Je m’attelle devant mon café à visualiser mentalement les visages puis colle sur leur front une étiquette aux coins arrondis et aux fines lignes bleues — les mêmes que l’on collait à l’école sur les cahiers de classe, en début d’année — étiquette sur laquelle j’écris ensuite avec un stylo à encre violette et de ma plus jolie écriture, celle qui m’oblige à tirer légèrement la langue, le prénom et le nom de la personne revenue se balader devant mon regard mental. 

Je dresse cette liste avec rigueur mais je m’aperçois au fur et à mesure qu’il sera difficile d’en venir à bout, qu’il me sera impossible de savoir, une fois le stylo posé, si la liste est vraiment complète. La mémoire a des interstices et des dérivations impénétrables. Je fais alors machine arrière pour effectuer l’inverse : tenter de me souvenir des visages et des noms que j’ai oubliés… Cette nouvelle tentative échouant encore plus vite que la précédente, je me recouche, frustré. 

Dans le miroir, les Autres ricanent. D’abord sous cape puis de manière communicative les rires augmentent jusqu’à se tordre de cynisme, et maintenant c’est à gorge déployée qu’ils inondent la salle de bains. Je m’enfouis sous les draps. J’ai froid au bout du nez. La salle de bains n’est plus que rires et sarcasmes. Tout ça est vraiment très désagréable.
  • 7.1.23

Le miroir des autres 39

Les Autres sont utiles au bon fonctionnement de mon cerveau 
(J’essaie de m’en persuader)

J’allume le miroir 
Théo file sous la pluie de la douche, Cuné gronde une goutte d’eau 
Philémon pense « sobriété heureuse » tandis que Théophile reprend un verre 
Cunégonde pousse une coupelle de cacahuètes puis éclabousse 
Conception diminue son visage et son prénom de moitié
Concep influence Arthémise qui devient Arthé 
Arthé utilise l’autre moitié du visage laissé vacant par Concep
Elles prennent place toutes les deux dans le coin supérieur droit du miroir
Elles sont chargées à 100%, leur corps est à mémoire de forme (pratique)
Philémon est fourbu, l’appeler Philé peut le requinquer
Le bac de douche dégorge, son glouglou fait des vocalises et un peu peur 
Je sèche une larme qui glisse sur le nez de Cuné
J’éteins le miroir
  • 6.1.23

Le miroir des autres 38

Lorsque je suis dans la pièce à vivre de mon appartement, c’est-à-dire dans mon salon-cuisine-bureau-buanderie-salle de jeux-salle à manger, les autres pièces ne sont pas « à vivre » puisque je n’y suis pas, n’y vis pas. Dès lors, peut-on les considérer comme des pièces mortes ou plutôt des pièces à mourir ?

Par exemple, quand je ne suis pas à l’intérieur, la salle de bains plongée dans le noir déprime-t-elle jusqu’à se laisser mourir de chagrin ? 
Disons que, par paresse plus que par manque d’hygiène, un jour, mettons un dimanche, je n’y entre pas. Douché de la veille au soir et ne comptant pas sortir de la journée (on est dimanche après tout), j’ai décidé de ne pas quitter la pièce à vivre principale. Dans ce cas-là, succombera-t-elle parce qu’elle n’aura vu personne durant plus de vingt-quatre heures ?

Si cela se vérifie, alors les Autres du miroir de la salle de bains vivent dans une pièce morte. Brrrr, c’est glaçant.
  • 5.1.23

Le miroir des autres 37

Les Autres coulent dans le miroir comme dans un entonnoir  
Cunégonde s’éveille avec mal aux cheveux, ses yeux glissent liquides 
Théophile tâte du goulot dès potron-minet, cherche des poux à Cuné
Une odeur de caramel entoure Philémon, il inonde le miroir de jurons
Je déplie le miroir, Fleurine dans le noir suce son pouce
Arthémise et Conception chargent encore leurs visages, elles ne progressent pas 
Le robinet du lavabo goutte, le choc de l’eau sur l’émail est une torture
Sortant de la salle de bains, le gargouillement des Autres me suit
  • 4.1.23

Le miroir des autres 36

Que faire des Autres dans l’impasse du miroir
Les regarder vivre et mourir,
faire bloc dans leurs cendres recomposées 
Tirer sur la corde pour m’échapper de mon reflet 
Ou bien attendre que viennent leurs histoires sous la buée des jours ?
J’écarte les bras, mains sur les bords
du lavabo
Je suis cet homme, cet Autre qui se débat dans chaque geste 
Avec la prétention d’en faire poème
  • 3.1.23