Tu as peur de sortir

Tu as peur de sortir de ta chambre. Dans le couloir, tu perçois un danger aussi impressionnant qu’il est invisible. Si tu sors, si tu ouvres la porte qui donne sur le couloir, si tu décides d’affronter l’air qui tourne à l’extérieur de la chambre, une falaise t’attend et à ses pieds, un océan, un vaste océan ; pas une mare, ni même un lac paisible, non, un grand et vaste océan déchaîné et peuplé de vagues infinies, de rouleaux meurtriers, de mammifères marins à grandes dents, d’oiseaux aux ailes tranchantes mais aussi de navires battant pavillon noir et dont le pont est rempli d’hommes édentés, aux ventres ronds et aux rires carnassiers.
Tu as peur de sortir de ta chambre. L’étendue de l’océan dans le couloir, le battement des oiseaux le long des murs, le grain qui peut survenir à tout moment et t’emporter. C’est la tempête entre deux portes et cet escalier au bout du couloir comme la promesse d'une écoutille n’est qu’un leurre pour masquer l’abîme. Il y a hors de ta chambre trop de bruits et d’incertitudes, trop de peurs. Aucune rampe à laquelle s’accrocher pour te sauver des eaux. Personne pour te secourir, le passage est trop étroit, le niveau de l'océan trop haut.
Des flots et un raffut immenses dans un si petit couloir. Quand tu y penses, ce n’est pas possible. Derrière cette porte, il ne peut y avoir que ces murs dont tu connais l’existence. Deux murs parallèles qui forment à l’évidence un couloir tout ce qu’il y a de plus normal, une banale coursive qui dessert ta chambre et les autres pièces. Pas d’océan, ni de précipice, pas plus que de danger à ouvrir la porte qui donne sur ce couloir. Mais voilà, dans ta chambre, une courbure du temps te joue des tours. Un ange dans ta tête attend que s’émeuvent les sirènes : tu ne peux pas sortir.

01/02/2018
  • 1.2.20

Pluie de mouches

Il pleut. Les gouttes viennent s’écraser sur la vitre comme des grosses mouches. Tu les regardes éclater et tu imagines leurs abdomens glissant lentement sur le verre. Tu prends le fracas de la pluie pour une nuée sauvage, un suicide collectif. A cette pensée, tu esquisses un sourire et viens poser tes lèvres sur l’intérieur de la vitre. Tu embrasses à travers le verre chaque goutte qui glisse, chaque mouche qui meurt.

Il pleut. De plus en plus fort. Tu n’arrives plus à saisir de ta bouche chaque impact. Tes lèvres font l’effet d’une ventouse sur la vitre. Tu veux attraper toutes les mouches, qu’aucune n’en réchappe, les embrasser puis les avaler une à une pour mettre fin à leur souffrance. Tu t’énerves. Désormais, dans la précipitation, c’est avec ta tête que tu cognes la vitre : ça provoque un bruit lourd qui fait vibrer la fenêtre comme lorsque sonne le glas au beffroi du village et que les murs de la maison s’en font l’écho. 

Il pleut. Et tu n’en peux plus de chasser les mouches toujours plus nombreuses, toujours plus ruisselantes avec leurs abdomens putrides. Tu lèches la vitre. Ton front devenu rouge glisse de haut en bas et de bas en haut, frénétiquement. Tu deviens fou, ne veux plus voir, ne plus savoir cette hécatombe.

Il pleut. Tu t’allonges sur le rebord de la fenêtre, les yeux errant sur le plafond. Tu fermes les yeux. Ta respiration diminue. Tu t’apaises, laisses entrer en toi la musique de la pluie qui fouette la vitre. Une mouche, une seule, une vraie, se pose sur ton front. Tu t’endors. A moins que tu ne t’éveilles.

  • 11.9.19

Partir d'ici #JourSansE

Tout à sa transpiration,
il sarclait son lopin à cailloux
sachant qu’un jour il partirait.

Partir d’ici
où un mauvais plant habitait sa chair,
où tout buisson ourdissait son chagrin.

Là-bas, il irait la voir dans son pays,
là où un flux divin incitait l’outil,
là où au travail l’amour s’unirait.

#JourSansE
  • 13.3.18

La recluse

Au travers du rideau tricoté au crochet avec de larges losanges aux fanfreluches grisonnantes de poussière, la voisine, ses yeux ronds et vides, scrute le dehors, son ennemi depuis qu'elle vit recluse. Elle épie le passant, le moindre bruit suspect : une portière qui claque trop violemment, une voiture qui démarre trop vite, le vrombissement de la mobylette du facteur ou encore le ballon du gamin qui rebondit sur le trottoir menaçant à chaque instant de briser une vitre.

En arrêt derrière sa fenêtre, un fauteuil confortable, un magazine télé et la télécommande, elle garde un oeil suspect sur la vie du dehors. Car, elle, sa vie, c'est à l'intérieur que ça se passe, c'est dans la télé, Pernaut et les nouvelles qui mortifient. Alors, le dehors devient suspect, les gens du danger, les bruits quotidiens des alertes. Tout est vrai, ils le disent dans la lucarne. Tous les jours, tous ces drames, toutes ces agressions, toutes ces catastrophes, le monde est insécure et depuis qu'elle l'a compris, elle ne sort plus.

Elle est certaine que tous ces gens, là dans sa rue, peuvent à tout moment représenter un risque. C'est eux qui sont responsables de tout ce qui se passe dans le poste. Ils peuvent déborder, s'en prendre à elle, à son intégrité, à sa liberté. Ils peuvent tout remettre en cause, s'introduire chez elle, la déposséder du peu qu'elle a réussi à obtenir. Il faut qu'elle veille, au plus près d'eux sans se faire remarquer. À son poste d'observation, entre les mailles de son rideau jaunâtre, elle reste à l'affût, sur le pied de guerre, et qui croise un jour son regard le sait : mieux vaut ne pas s'aventurer trop près d'elle. Ses yeux gros semblant quitter leur orbite vous foudroient. Les plis de son visage qui glissent de la pénombre jusqu'à la rue vous transforment en enfant apeuré. Ses dents qui sortent de sa bouche comme un molosse montre ses crocs vous dissuadent pour toujours de longer ses murs.

Faudrait peut-être lui couper la télévision pour que quelque chose change.
  • 8.3.18

La main dans le sac

Tu es pris la main dans le sac. A fouiller pour trouver on ne sait quoi. Ta main agite ses doigts dans le sac. Tu aimes ça, le sac agité par ta main qui le fouille. Il en est tout boursouflé. Son cuir, pourtant épais, se tord, se tend, retombe puis souffle. Le sac est déformé par ta main qui le fouille. Tu aimes ça. L’affaire est dans le sac, dis-tu. L’affaire que tu cherches, car tu cherches toujours des affaires. On a même l’habitude de dire que tu cherches des noises. Une drôle d’affaire pour te faire remarquer, avec laquelle tu pourras créer une rupture avec les autres, avec toi.
Tu cherches un objet, un papier important, un stylo précieux, une pièce de monnaie perdue entre deux vieux mouchoirs ou un quelconque autre objet à voler qui va soudain se révéler d’une grande valeur. Alors que ce n’est rien. Juste un petit larcin qui te fera vivre le temps que le ou la propriétaire du sac s’agace, qu’à son tour il cherche, fouille dans le sac, ne trouve pas, s’offusque, t’accuse. Ce temps-là est une parenthèse joyeuse. Tu existes. Tu es le voleur, celui qu’on accuse et que personne ne défend. Tu peux à ton tour te sentir heurté, dire que ce n’est pas toi, que tu n’as jamais touché le sac, que tu n’as rien volé.
Mais voilà aujourd’hui dans ce sac, tu agites, tu tournes la main dans tous les sens, tu désosses les poches intérieures, tu vides tout, éparpilles, renifles, jettes mais ne trouves pas la chose à chaparder. Tu es pris la main dans le sac et tu n’as rien trouvé pour allumer dans tes yeux cette lumière folle qui te rend heureux. Tu n’aimes pas ça.
  • 9.2.18

Deus ex machina

Tu as peur de sortir de ta chambre. Dans le couloir, tu perçois un danger aussi impressionnant qu’il est invisible. Si tu sors, si tu ouvres la porte qui donne sur le couloir, si tu décides d’affronter l’air qui tourne à l’extérieur de la chambre, une falaise t’attend et à ses pieds, un océan, un vaste océan ; pas une mare, ni même un lac paisible, non, un grand et vaste océan déchaîné et peuplé de vagues infinies, de rouleaux meurtriers, de mammifères marins à grandes dents, d’oiseaux aux ailes tranchantes mais aussi de navires battant pavillon noir et dont le pont est rempli d’hommes édentés, aux ventres ronds et aux rires carnassiers.
Tu as peur de sortir de ta chambre. L’étendue de l’océan dans le couloir, le battement des oiseaux le long des murs, le grain qui peut survenir à tout moment et t’emporter. C’est la tempête entre deux portes et cet escalier au bout du couloir comme la promesse d'une écoutille n’est qu’un leurre pour masquer l’abîme. Il y a hors de ta chambre trop de bruits et d’incertitudes, trop de peurs. Aucune rampe à laquelle s’accrocher pour te sauver des eaux. Personne pour te secourir, le passage est trop étroit, le niveau de l'océan trop haut.
Des flots et un raffut immenses dans un si petit couloir. Quand tu y penses, ce n’est pas possible. Derrière cette porte, il ne peut y avoir que ces murs dont tu connais l’existence. Deux murs parallèles qui forment à l’évidence un couloir tout ce qu’il y a de plus normal, une banale coursive qui dessert ta chambre et les autres pièces. Pas d’océan, ni de précipice, pas plus que de danger à ouvrir la porte qui donne sur ce couloir. Mais voilà, dans ta chambre, une courbure du temps te joue des tours. Un ange dans ta tête attend que s’émeuvent les sirènes : tu ne peux pas sortir.

  • 1.2.18

Aux premières ombres

Il ne faudrait pas beaucoup secouer pour que sortent les larmes. Alors, tu restes assis dans ton fauteuil. Un livre, une tasse de thé, une cigarette pour la fin de chaque chapitre et pour le reste qui ballote au fond de ton ventre, tu oublies.
Et quoi de mieux qu’une belle histoire pour laisser de côté le roulis de l’âme. Les pages défilent sans toi. Du moins, sans ton corps, sans ta vie que tu prends soin d’écraser dans le cendrier ou de noyer dans ton Earl-grey, entre le noir et la bergamote. 
Les heures passent ainsi jusqu’aux premières ombres. Elles avancent rampantes, d’abord sur les murs puis sur le coin de ta page. Rapidement, elles taquinent un point, assombrissent une virgule et gagnent du terrain sur le prochain paragraphe. Tu allumes la lampe mais rien n’y fait. Le noir s’évertue à tout effacer autour de toi, attaque tes pieds, remonte le long de tes jambes. Te voilà à moitié rongé par l’obscurité. Tu lèves le livre au-dessus de ta tête. Au moins sauver l’histoire. Mais les ombres continuent leur chemin. Bientôt, on ne voit plus que ton visage étonnamment clair et le halo de la lampe. Ton corps n’est plus qu’une ombre parmi les ombres. Du livre, il ne reste que la couverture flottant dans l’air. Du cendrier qu’un point rouge incandescent. De la tasse de thé qu’un arrière-goût de larmes.
Cela fait partie du jeu de l’immobile. Tout sombre sur toi.

  • 27.1.18

Six heures trente

Tu tournes autour du pâté de maisons. Une marche lente entrecoupée par les arrêts du chien.
Près d’un lampadaire, il lève pour la première fois la patte, quelques centilitres pour celui-ci. Il en garde en réserve pour le prochain qu'il sait sentir meilleur ; l’odeur d’une femelle, te dis-tu esquissant un sourire tout en serrant la laisse.
Plus loin, il tire et te donne du fil à retordre. Il ralentit puis accélère en reniflant les pas d’un jeune garçon qui, distrait, fait tomber par petites flaques des morceaux de sa crème glacée. Tu t’excuses du comportement de ton chien auprès de la mère qui, à la vue du bestiau, te lance un regard réprobateur. Juste le temps d’ajouter que son garçon sème sa glace sur le trottoir qu’elle disparaît, sa progéniture serrée dans les bras.
La journée s’achève et tu sais que, dans cette grande artère de la ville, tu vas croiser du monde. Sortie des bureaux, foule compacte qui jaillit des bouches du métro. Tu aimes ça, traverser la foule avec ton chien. Tu as l’impression d’être des leurs, de revenir, toi aussi, de ta journée de travail. On pourrait presque le croire, si ce n’était le chien, bien sûr. Rares sont les personnes qui vont travailler avec leur animal de compagnie. 
Six heures trente. Tu sais que c’est l’heure où la rame la plus bondée va lâcher sa cargaison dans l’avenue. Des centaines de gens vont sortir de la terre pour te rencontrer. Ils ne le savent pas mais chaque jour, à la même heure, ils ont rendez-vous avec toi et ton chien pour votre bain quotidien. D’ailleurs, l’impatience grandit. Tu te prépares, fais en sorte de tenir plus fermement le chien. Lui aussi s’excite en remuant frénétiquement la queue. Tu raccourcis la laisse pour qu’il soit juste à côté de toi, qu’il ne déborde pas de la foule, qu’il n’effraie ou pire qu’il ne morde personne. 
Tu entends le souffle du métro. Tu te tiens juste en haut des escaliers, le regard fixe, les pieds bien à plat au sol, au milieu du passage. Ton chien, assis à tes pieds, tire la langue avec avidité. Le souffle puis la rumeur, des voix, des bruits de pas et bientôt la première vague qui t’engloutit.
Tu n’auras fait que dix euros, aujourd’hui.

  • 24.1.18

Du rouge pour le ciel

Tu dessines des arabesques sur ton cahier à spirale. Quelques volutes de fumée au-dessus d’une cheminée plantée sur une petite maison caricaturée. Deux pans de murs et un toit conique, une seule fenêtre à droite d’une porte entrouverte d’où sinue ce qui ressemble à un chemin de jardin qui descend jusqu’à une route. Là sont garées deux voitures, un rouge et une verte, contre un trait tracé à la règle qu’on comprend être le trottoir.
Ton crayon gris fait monter la fumée jusqu’au ciel au centre duquel trône un gros soleil rond avec de longues pattes velues en guise de rayons. Ton ciel étrangement n’est pas bleu mais haché de rayures rouges s’entremêlant les unes aux autres ; ce qui donne au paysage un air d’apocalypse comme si la maison était surplombée par plusieurs nuages menaçants.
Ta mère venue se pencher au-dessus de tes épaules te fait remarquer ce ciel étrange. Pourquoi le rouge et pas le bleu ? « Tu n’as pas un crayon bleu ? », s’aventure-t-elle à te demander. « Si c’est le cas, tu aurais pu dessiner un dégradé de gris et d’orange comme lorsque le soleil se couche et que le ciel s’embrase. Mais pas ce rouge-là, il ne convient pas. »
Tu ne l’écoutes pas et au lieu de répondre, tu continues à barbouiller le ciel de fumée, passes entre les flaques rouges, repasses, dépasses de la feuille, de plus en plus violemment si bien que tu en arrives à barbouiller tout le dessin. Plus de maison, plus de ciel ni de chemin, plus de voitures stationnées devant la maison. Uniquement un rouge sang mêlé à un brouillamini de gris. 
« Le feu ! Le feu ! », finis-tu par crier en écrasant de rage les deux crayons sur la feuille.
Dehors, on entend hurler plusieurs sirènes de pompiers tandis que du ciel tombe une pluie de cendres.

  • 20.1.18

Un peu de lait

C’est le début de l’été. Tu es assis au bout de la table familiale face à ta tasse de café. Les enfants sont montés dans leurs chambres. Ton épouse est près de toi, à lire un livre ou à faire semblant de lire un livre. L’air est doux et toutes les fenêtres de la maison sont ouvertes. Il doit être quasiment vingt heures. C’est toujours à cette heure-là que vous terminez le repas. Tu regardes par la fenêtre de la salle à manger cette soirée qui débute. Quelques nuages pommellent un ciel encore bleu. Pensif, tu suis leur glissement lent, leur étirement en toutes sortes de formes tarabiscotées. Pendant ce temps, le café refroidit.
Sans t’en rendre compte, tu le touilles depuis plusieurs minutes, perdu dans des idées confuses, tandis que les nuages continuent à s’effilocher vers la pénombre. Tu tends la petite cuillère dans leur direction comme pour agrémenter ton petit noir d’un peu de leur lait. Tu souris, reprends un instant tes esprits et descends le café d’une gorgée. L’âpreté du breuvage froid te tire une moue de dégoût. 
Péniblement, tu te hisses de ta chaise en prenant appui sur la table. A moitié redressé, les yeux encore pris dans le chassé-croisé des nuages, tu vois le jour s’enfuir à travers la fenêtre.
Un éclair, un peu de lait et le noir.

  • 17.1.18

Vous avez toujours vécu dans cette maison

Vous avez toujours vécu dans cette maison.

Les murs en gardent le souvenir. Des portraits de ton père et de ta mère enlacés sont exposés dans toutes les pièces, dans le salon, dans ta chambre, dans la cuisine… Plusieurs époques s’enchaînent sur ces photographies encadrées avec soin. On peut les voir jeunes en vacances avec, en arrière-plan, de larges plages de sable blanc ou au sommet d’une montagne enneigée ou encore devant un décor de savane africaine où ils semblent poser pour une carte postale. Ils sont partout, jusque dans les toilettes où sur la porte, côté intérieur, tu as collé un poster d’eux quasiment grandeur nature. Ton père et ta mère sur pieds face à toi accroupi qui les regardes comme des dieux.
On les trouve aussi sur des reproductions grand-format, un peu plus âgés puis vraiment vieux, assis et toujours serrés l’un contre l’autre, dans le canapé du salon sur lequel encore aujourd’hui, tu t’assieds en réajustant les vieux coussins et en songeant à eux, à leur absence, au vide qu’ils ont laissé dans cette maison.

Absence qu’il faut oublier car pour toi ils sont toujours présents entre ces murs. C’est ce que tu as dit le jour où tu as entrepris de sortir tous les albums de la bibliothèque et de retirer chaque cliché de leur protection plastique qui les isolait du temps. Tu les as fait agrandir, retoucher, encadrer par un professionnel en ne lésinant pas sur la dépense. Des cadres en bois précieux, des agrandissements de qualité à partir des négatifs que ton père prenait soin de ranger à la fin de chaque album. 
Aujourd’hui, la maison ressemble à un mausolée. D’ailleurs, il n’est pas rare que tu allumes quelques bougies que tu disposes sur les vieux meubles juste sous les photos. Leurs visages s’éclairent alors comme s’ils sortaient de tombe pour hanter tes soirées. Toi, tu préfères dire que le mouvement des flammes les réanime et les fait revenir s’asseoir à tes côtés, sur le canapé.

Vous avez toujours vécu dans cette maison.

Sans eux, elle n’a plus aucune utilité, plus aucun sens. Sans eux sur les murs, tu ne pourrais plus y vivre. Tu répètes cela à toute personne qui entre dans la maison, effaré par l’omniprésence de tes parents. Des photos par centaines qui masquent jusqu’à la couleur des murs, photos glaçantes, photos sur lesquelles le regard de tes parents semble suivre chaque mouvement dans la pièce comme s’ils étaient eux-mêmes surpris de se trouver là, dupliqués jusqu’à l’infini. Cette situation avoisine la démence. Cette mise en scène du souvenir portée à son paroxysme inquiète ton entourage qui ne comprend pas ton comportement.

Tu les laisses dire. Ils ne peuvent pas comprendre ton attachement à eux. Ils ont leurs parents, eux encore. Ils ne savent pas combien ça fait mal d’être orphelin.
Pourtant, on n’a jamais retrouvé une seule photo de toi dans les albums désormais tous vides et crevés dans le bas de la bibliothèque. Aucune photo de toi, le fils bien-aimé qui se dit gardien de la mémoire de ses parents. Pourquoi ? Jamais tu ne t’es posé cette question qui représente ici la seule absence notable : toi.

Tu as toujours vécu dans cette maison.

  • 17.10.17

Entre les pas

Venu de la pénombre de la cour, tu entends un bruit. Comme s’il y avait quelqu’un. Tu entends ce bruit, un bruit de porte et ensuite des pas sur les graviers qui soudain s’arrêtent et semblent gratter le sol. Des pas et puis la pointe d’une chaussure qui chercherait, sous les petits cailloux, dans le sable meuble, à faire un trou dans la cour ou bien écraserait nerveusement un mégot de cigarette.
Les pas reprennent. Tu les entends s’éloigner puis revenir, tourner autour de toi, si près qu’on les dirait dans ton salon, là, près de toi qui es en train de lire dans ton fauteuil ; mais ils sont dans la cour, enfin, ils sont dehors, c’est sûr qu’ils sont dehors, mais sans que tu ne puisses vraiment préciser si ce bruit lancinant de gravillons écrasés résonne vraiment chez toi, dans ta cour ou si c’est ailleurs plus loin, dans la rue étroite où les immeubles hauts font souvent écho à des bruits extérieurs qui peuvent très bien être des bruits de pas sur les graviers d’un autre ou des bruits quelconques, somme toute ordinaires, des bruits de la ville où les cours en graviers sont légion et qui viennent à toi comme s’ils étaient chez toi.
Les pas disparaissent et laissent place à un silence inhabituel, un silence trop pur. Tu sais que ça va reprendre. Alors tu lèves le nez de ton livre, sors dans la cour, marches sur les graviers où tu retrouves le bruit mais là c’est ton bruit, le bruit de tes pas sur les graviers. Rien à voir avec le bruit des pas de tout à l’heure. Non, ton pas est plus léger puis c’est ton pas, ce n’est pas un bruit extérieur, pas le pas de quelqu’un d’autre. Tu connais quand même le bruit de ton pas et celui de la porte que tu ouvres. Ici aussi, ce n’est pas le même. La porte émet un son plus long avec ce claquement spécifique de la poignée et ce raclement au sol agaçant depuis qu’elle a gonflé avec les dernières pluies. Ce n’est pas le bruit sec et bref de la porte que tu as entendu il y a cinq minutes.
Tu sors dans la rue. Les immeubles sont là, rassurants, hauts et majestueux, ne renvoyant aucun bruit notable si ce n’est le grésillement d’un lampadaire. C’est la nuit pleine, calme et silencieuse. La porte claque derrière toi prise par un courant d’air aussi anormal que soudain. Tu es enfermé dehors, seul avec une angoisse trouble, sans comprendre vraiment où tu te situes entre les pas. Des pas qui, sur les graviers, reprennent leur tour dans la cour. Les mêmes pas qui ne sont pas les tiens, parce que plus lourds, plus massifs, des pas d’homme plus grand, plus fort. La même pointe qui gratte, qui insiste pour comprimer quelque chose sur le sol. Puis le même silence tordu, le même que tu as vécu dans le fauteuil, celui qui t’a décidé à te lever pour aller voir, avant que les pas à nouveau foulent la cour.
Le lampadaire a cessé de grésiller, il s’éteint lentement. Tu tires une dernière bouffée de ta cigarette et l’écrases dans le caniveau avec le bout de ta chaussure.
  • 11.10.17

La photo

Tu prends l’escalier qui descend à la cave. Devant la porte, l’interrupteur te résiste. L’installation électrique est ancienne et le commutateur ne fonctionne plus très bien. Tu dois t’y reprendre à plusieurs fois. Tu actionnes nerveusement le loquet chromé mais rien ne se passe. Sous la petite cloche de l’interrupteur également chromée, un petit grésillement résonne sans qu’aucune lumière ne jaillisse. Tu te dis qu’il faudrait changer tout ça, que ce vieux bouton dont les branchements sont enfouis dans la porcelaine depuis des dizaines d’années finira par lâcher ou pire, un jour t’électrocuter. Tu te dis ça à chaque fois que tu descends à la cave puis tu oublies.

L’ampoule nue suspendue à un fil décati trône au centre de la petite pièce comme un gros oeil de bœuf sorti de son orbite. Elle finit par s’éclairer en affolant quelques insectes alentour. La cave est basse de plafond. Tu y pénètres courbé, défiant les toiles d’araignées qui chatouillent ton visage. Tu es venu chercher une boîte de chaussures dans laquelle tu as rassemblé de vieilles photos. Ta fille est passée te voir et dans la discussion, vous avez évoqué quelques souvenirs, des anecdotes sans importance dont une sur laquelle vous n’êtes pas d’accord. Trois fois rien mais, comme elle te tient tête, tu veux lui prouver que ce jour-là, le jour de tes soixante ans où vraiment tu avais trop bu et amusé toute la galerie, il y avait bien tante Émilie aujourd’hui décédée, que même tu as une photo dans la cave qui te donnera raison.

Entre les bouteilles de vin poussiéreuses, les outils du jardin et autres objets hétéroclites dont tu peines à reconnaître l’utilité, il devrait y avoir cette foutue boîte. Tu cherches, déplaces d’abord avec précaution toutes ces vieilleries, puis de plus en plus agacé, tu commences à bousculer avec rage tout ce qui se trouve sur les deux étagères. Emporté dans tes gesticulations, tu lèves la tête brusquement, cognes le plafond puis la grosse ampoule qui lâche un dernier soupir nasillard et s’éteint.

Tu grognes dans ta barbe, implores tous les dieux et lances bien fort un florilège de jurons qui remontent l’escalier pour résonner dans toute la maison, sans pour autant inquiéter ta fille qui, habituée à tes emportements, esquisse même un sourire bienveillant. Tant bien que mal, tu retrouves la sortie de la cave et retournes auprès d’elle. Même si elle se doute bien que tu ne l’as pas trouvée, elle te demande ce qu’il en est de la fameuse photo. Tu tournes la tête vers la fenêtre qui donne sur le jardin, l’air toujours renfrogné. Quelle photo ?

Tu fais ça à chaque fois que tu descends à la cave puis tu oublies.
  • 1.10.17

Au bout de tes pieds

Tu es assis près du poêle à réchauffer ta carcasse, les pieds nus tendus vers le foyer.  Derrière la vitre, les flammes font leur place entre les traces de suie collées à la paroi. Tu joues avec tes orteils en écartant chaque phalange jusqu’à les faire craquer. Le bruit de tes petits os se confond avec le claquement du bois sec. Tu te sens aussi faible qu’une branche de frêne. En toi tout est friable.

Une lumière douce sort du hublot et vient un temps t’apaiser. Elle fixe tes jambes dans un faisceau aussi concentré que le halo d’une lampe. Des ombres s’insinuent entre les plis de ton pantalon retroussé aux chevilles. Guidées par la langue des flammes, elles glissent sur le plancher en dessinant des silhouettes biscornues sur lesquelles ton regard se perd.

Tu es assis près du poêle et tes pensées se font vieilles. Elles tournent sans cesse dans ta tête dans d’infinies remembrances. Tu te sens fatigué. Trop pour vraiment te rendre compte de l’aigreur qui remplit ton cœur. Mais tu sens bien que quelque chose se termine, qu’au bout de tes pieds, ce ne sont plus vraiment tes orteils qui craquent. Que la fin approche à force de ressasser les mêmes marottes, à force de mentir aux pieds qui te portent comme l’ombre ment au sol et les flammes au feu.

  • 29.9.17

La cage

Tu as roulé sous la table. En position fœtale, tu t’endors ou fais mine de t’endormir. Rien ne peut t’empêcher de faire cette démonstration. L’isolement, c’est ta sauvegarde, ton laisser-passer pour l’autre monde. 

A chaque fin de repas, tu cherches la querelle qui va t’animer, toi l’animal qui n’existes plus que prostré dans sa cage. Tout est prétexte à te mettre en position de victime. Ton père, ta mère, ta sœur, un geste de leur part, une parole anodine, un regard qui fuit, et tu éclates en sanglots, distribues des insanités dans un accès de colère effrayant. Ton âme déborde de ton corps, toise les autres, passe de l’autre côté. Tu sembles possédé par le démon. Les mots, les jurons, les râles et très vite des cris primaux jaillissent sans que tu donnes l’impression de te servir de ta bouche pour les articuler, mais plutôt de tous tes membres qui s’agitent à une vitesse folle. Une crise démesurée sans émotion apparente pour mieux te cloîtrer dans un silence glaçant ; d’abord sur ta chaise les bras croisés, le regard vacant, puis sous la table où tu descends pour te mettre à couvert, pour retrouver la cage.

La stupeur des tiens te gargarise, t’emporte loin dans ton mutisme. Tu jubiles intérieurement de savoir qu’en haut, au-dessus de toi, autour de la table, la panique s’est emparée des visages pour les figer comme des stèles.
Tu n’es pas l’enfant qui boude. A cet instant, tu n’es plus l’enfant de personne. Tu t’enfermes pour faire grandir une jouissance connue de toi seul et qui passe à travers ton corps dans un geyser de bien-être. 
Tu as trouvé le moyen de te retrancher du monde. Accroupi, tu joues avec ta serviette, fouettes le sol dans un dernier soubresaut. Tu l’enroules autour de ton cou, la serres jusqu'à presque ne plus pouvoir respirer. Tu tires la langue, tu convulses sans bruit, recroquevillé en chien de fusil pour une mort controuvée.

Tu as roulé sous la table. Plus personne ne te fera sortir, à part la nuit que tu attends comme une amante.

  • 18.9.17

L'odeur

La cheminée couve des cendres encore chaudes de la veille. Dans la pièce, l’odeur de fumée est vive. Elle se mélange à la poussière qui danse autour des gros rideaux en velours. C’est une odeur lourde, de bois calciné, de petites branches de frêne que tu as fait brûler en premier pour attiser le rondin de chêne un peu vert. Une odeur de forêt après un incendie qui aurait tout décimé, ne laissant plus flotter que des relents de lichens et de champignons moisis. Elle est non seulement incrustée dans les murs devenus jaunes, dans les tapisseries dont les motifs de fleurs ont fané, dans les meubles qui l’accueillent dans leurs interstices vermoulus et dans le sol en tomettes rouges patiné de suie, mais aussi dans ton corps flasque et fatigué, étendu sur ton lit de fortune.
Aujourd’hui, alors que le jour peine à percer les rideaux, il règne une atmosphère de trop-plein comme si cette pièce – ce salon qui est aussi ta salle à manger, ta cuisine et ta chambre – n’en pouvait plus d’être ce réduit de cendres, ce vieux cendrier froid.
Tu te lèves et ouvres la fenêtre. L’air frais du matin s’engouffre dans la pièce. Tu respires à grands poumons. La brume est basse. La campagne encore endormie te fait sentir son haleine fraîche. L’hiver lâche un grand rot dans la forêt qui te fait frémir et refermer la fenêtre.
Le courant d’air a ranimé la cheminée. De fines flammes lèchent l’âtre et embrasent le reste du rondin de chêne. L’odeur est maître de l’espace. Cette odeur, ton odeur que tu ne sens plus.

  • 9.9.17

Inéquations

Tu repasses dans ta tête tous les théorèmes du monde. Tout ce qui régit l’existence et que tu ne comprends pas.
Ce soir, une fois de plus, il y a un ciel d’orage qui étouffe toute réflexion et ranime des équations électriques pour lesquelles tu ne trouveras jamais de solution.
Alors, tu sors dans le soir plein de lourdes constantes. D’abord, le vieux chien du voisin qui te grogne dès qu’il te voit. Dix ans que tu le croises ce clebs à poils ras. Il te connaît mais continue à vouloir sauter le grillage pour te mordre. Ensuite, il y a le trottoir et son pavé manquant que tu évites en descendant sur la route. Ce trou sur ton passage que personne ne veut remplir. 
Tu descends la rue vers le parc où tu as tes habitudes. Tu franchis le portail pour y accéder, haut et lourd avec son immuable grincement de ferrailles lorsque tu le pousses d’un même effort, d'une même lassitude, sans comprendre pourquoi on ne le laisse pas grand ouvert en permanence. Puis, tu rejoins la mare au centre du jardin à la française et ton banc où tu t’assoies pour ruminer quelque algèbre de la vie. Tu regardes les buissons autour taillés en forme de points d’interrogations et dans l’eau traversée de carpes, le reflet noir de ton visage et de toutes tes questions.

  • 2.9.17

Au bout de la cibiche

Tu es là depuis des heures à regarder le ciel, sans qu’aucune pensée n’effleure ton esprit. Le rougeoiement de ta cigarette est le seul foyer de lumière dans l’obscurité profonde qui s’abat sur la terrasse et dans ta tête. Tu ne sais plus ce qui se passe, ni pourquoi tu es assis depuis si longtemps sur cette marche en béton inconfortable. Tu tires sur ta cibiche, lentement. Le noir du ciel te réconforte. Tu peux y laisser vagabonder ton regard sans qu’il n’accroche rien de sensible, rien qui pourrait te faire revenir à toi, provoquer un raisonnement que tu sais dérisoire.

Mais peut-on vraiment ne penser à rien ?

Le noir de la nuit est la plus vaste des prairies. Un lieu qui t’enlace et dont tu te sens soudain le centre, comme si plus rien n’existait que ton petit nombril perdu dans la complexité du monde. Finalement, tu penses plus que ce que tu crois. A ne vouloir plus rien examiner, le cerveau sécrète des échappatoires, se met à inventer plutôt qu’à rationaliser, saute d’une idée à une autre dans un désordre tel qu’il devient sa propre drogue.

L’air est doux, caressant une fin d’été qui, pour toi, aura duré plus d’une année. Tu voudrais que cette nuit l’efface, que cette seule pensée écrase le passé et te laisse rêver.

Tu écrases ta cigarette et en allumes une autre.

  • 26.8.17

Pluie de mouches

Il pleut. Les gouttes viennent s’écraser sur la vitre comme des grosses mouches. Tu les regardes éclater et tu imagines leurs abdomens glissant lentement sur le verre. Tu prends le fracas de la pluie pour une nuée sauvage, un suicide collectif. A cette pensée, tu esquisses un sourire et viens poser tes lèvres sur l’intérieur de la vitre. Tu embrasses à travers le verre chaque goutte qui glisse, chaque mouche qui meurt.

Il pleut. De plus en plus fort. Tu n’arrives plus à saisir de ta bouche chaque impact. Tes lèvres font l’effet d’une ventouse sur la vitre. Tu veux attraper toutes les mouches, qu’aucune n’en réchappe, les embrasser puis les avaler une à une pour mettre fin à leur souffrance. Tu t’énerves. Désormais, dans la précipitation, c’est avec ta tête que tu cognes la vitre : ça provoque un bruit lourd qui fait vibrer la fenêtre comme lorsque sonne le glas au beffroi du village et que les murs de la maison s’en font l’écho. 

Il pleut. Et tu n’en peux plus de chasser les mouches toujours plus nombreuses, toujours plus ruisselantes avec leurs abdomens putrides. Tu lèches la vitre. Ton front devenu rouge glisse de haut en bas et de bas en haut, frénétiquement. Tu deviens fou, ne veux plus voir, ne plus savoir cette hécatombe.

Il pleut. Tu t’allonges sur le rebord de la fenêtre, les yeux errant sur le plafond. Tu fermes les yeux. Ta respiration diminue. Tu t’apaises, laisses entrer en toi la musique de la pluie qui fouette la vitre. Une mouche, une seule, une vraie, se pose sur ton front. Tu t’endors. A moins que tu ne t’éveilles.

*

Lecture impromptue de Claude Enuset :

  • 13.8.17

Par la souillarde

Devant la maison, une montagne blanche dressée jusqu’à la moitié de la fenêtre. Il a neigé toute la nuit et au petit matin, impossible de sortir. La porte est bloquée. Il va falloir pelleter.

Tu sors par l’arrière de la maison. Par la souillarde, l’accès est dégagé.

Tu enfiles tes bottes fourrées, une paire de gants et ta vieille canadienne en cuir et te voilà, petit homme des neiges, à déblayer à grands coups de pelles. D’abord, redécouvrir le chemin qui traverse le jardin en créant une tranchée entre les congères, quasiment à hauteur d’un garçon ; ensuite, pour permettre d’accéder à la porte d’entrée, déneiger la terrasse où tout le mobilier a été recouvert. On ne sait plus où se trouvent la table et ses chaises, ton rocking-chair et même la niche du chien. Tout ploie sous plus d’un mètre de mélasse blanche et épaisse.

Il faudra bien la matinée pour arriver à tout dégager, s’il ne se remet pas à neiger. Le ciel est encore blanc comme du lait, le vent a molli mais il va se réveiller. Il va encore neiger, c’est sûr. La température est négative mais dans quelques minutes, elle atteindra le zéro pour encore recouvrir un peu plus la terrasse. Tu voudrais connaître la température exacte mais ne retrouves pas le thermomètre posé habituellement sur le rebord de la fenêtre. Tes mains malgré les gants commencent à geler. Tu as du mal à lancer la pelle dans la neige compacte. Tu la plantes souvent dans de la glace qui se forme plus vite que tu ne travailles.

Au bout de deux heures, le jour timide se lève et tu abandonnes. Tu retournes au chaud  par la souillarde que tu fermes à double tour.

Il est huit heures. La maisonnée s’éveille dans un relent givré qui pique le nez. Le chien, truffe chaude, vient renifler tes bottes et surpris par le froid, retourne s’allonger sur la carpette près de la cheminée.
Puis enfin elle descend lentement de votre chambre par le grand escalier en colimaçon. Le visage balayé d’un sommeil agité, elle réclame son café que tu lui sers sans un mot. Tu la regardes tendrement sans qu’elle ne lève les yeux de son bol. Tu serres la clé de la souillarde dans ton poing. Finalement, tu es heureux. Elle n’ira pas travailler aujourd’hui.
  • 5.8.17