D’un bord à l’autre

Le temps roule dans la rue
au son des butées mécaniques,
écho contre écho entre les murs.

L’après-midi est presque nuit,
j’habite une petite ombre
la ville ouverte à mes pieds.

Je prends un livre, le quartier 
puis le monde – maintenant
tout roule en automatique 
d’un bord à l’autre de la pluie.
  • 30.10.24

Je te parle d’un temps

Je te parle d’un temps où l’on prenait les photos au format paysage. La terre était horizontale et on stabilisait l’horizon comme on pouvait.

On avait les coudes sur la table, le nez qui coule et les idées dans nos cheveux semblaient des oiseaux. On développait nos clichés une fois par mois et on jetait plus que l’on ne gardait. On se prenait pour des voleurs de couleurs. 

Je te parle d’un temps avec lequel on fait aujourd’hui des poèmes. Ils sentent bon la poussière et l’eau de Cologne bon marché. Parfois, ils puent le manque.
  • 27.10.24

Tenter de comprendre

Le jour traîne des pieds.

Il faudrait apaiser la mémoire,
tenir l'oubli comme une promesse,

faire silence de tous les bruits,
en appeler à l'oiseau de passage :

de lui, tenter de comprendre
l'envol et la suspension,

pour soulever la poussière
qui colle à nos souliers.
  • 25.10.24

À vos souhaits

On fréquente le ciel 
depuis tellement de temps,

depuis tellement d’espaces
dépliés à nos yeux ahuris

qu’on en vient à oublier 
que souvent on le perd de vue,

comme aujourd’hui,

penchés que nous sommes
sur ce pauvre matin qui éternue.
  • 20.10.24

Tremblements

Parfois on est secoués
par des tremblements d’hier,

comme si on tombait
dans un fou rire d’enfant.

On se roulerait presque
par terre en se tapant le torse 

mais rien n’advient de semblable,
le rire est loin, le fou n’est plus.
  • 18.10.24

Pas si mal

Il n’est pas si mal d’être là
entre deux pensées fugaces,
le visage clos ni heureux ni triste.

C’est jeter
une pierre
dans un puits 

et attendre
que l’écho
remonte,

remonte
l’écho 
qui dit de l’eau :

ce n’est pas si mal d’être là
à ne rien espérer d’autre 
que la prochaine respiration.
  • 12.10.24

Clou

Variations du ciel, du cyan
au pas très clair, j’enfonce
un clou dans un nuage en forme de main. 

Variation du poids, étirement du nuage
qui n’est plus qu’un doigt 
avec un clou rapetissé, puis disparaît. 

Où en étais-je ? 
Ah oui, ne plus souffrir pour si peu. 
  • 5.10.24