Une place ronde comme on attend qu’une place soit ronde. Une place avec son arbre au milieu, entre des murs qui n’ont pas oublié leurs lilas et qu’ils portent en robe longue jusqu’à leurs pieds.
Une fontaine d’eau claire comme on attend que l’eau soit claire et dont les jets sporadiques semblent des oiseaux en mal d’atteindre le ciel, empêchés jusque dans leurs pépiements par le tumulte de la ville.
Des gens sur des bancs, comme on les attend : rêveurs, fumeurs, penseurs, tapoteurs d’écran, heureux, anxieux ou nostalgiques, se rêvant oiseaux aux plumes claires ou embrassant leur prochain amour sous des descentes de lilas.
Rien de neuf en somme, mais ce tout ordinaire dont j’aimerais garder chaque détail pour me souvenir longtemps.
L’air que j’ai respiré aujourd’hui a coulé plus vite. Limpidité et rythme, sans nul besoin de l’air des autres. Tiré d’un puits que, durant ce genre de jours, on croit inépuisable. Coulant depuis la roche des replis, ruisseau de vent intérieur venu jusque dans le creux des pensées palpiter palpiter, palpitant tant, palpitant trop pour être autre chose que l’air d’un jour exceptionnel.