Mémoire des rives

29.6.25

Il passe son temps à nettoyer les bords de l’eau. Cette eau vive, après les pluies, charrie toutes sortes d’immondices, de branches, de boue mêlée aux herbes — une mélasse qui s’agglutine et fait barrage.
Il faut, dit-il, créer le passage à grands coups de pelle, élaguer les arbres pour éviter que ne s’ajoutent des branches aux branches venues d’ailleurs, de la mélasse à la mélasse des montagnes.
Son front porte haut dans ces moments-là. Il est le sauveur des eaux avant qu’en été, elles ne se taisent. Que le ruisseau s’éteigne. Que l’eau ne coure plus, qu’elle laisse place à une terre sèche parcheminée de crevasses. Certains lui disent que son travail ne sert à rien, qu’il faut laisser faire la nature. Que l’eau passe et se calme. Mais rien n’y fait. Il passe son temps à nettoyer les ravines.
Il sait ce que retient la mémoire des rives.

2021

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