Le temps est à l’oubli
9.9.25Comme une embuscade, le jour tombe et le ciel se fend en deux au-dessus des petites colonnes que forment les cheminées sur les toits. Une des baies de la maison d’en face s’éclaire, et un visage derrière les rideaux s’enferme dans leur ombre.
Le temps est à l’oubli. Le temps est au repos, pour une fin de journée que l’on étire dans un soupir d’aise.
Il n’est que dix-huit heures, mais un homme prépare déjà la table du soir : il ajuste une nappe, dispose deux couverts, une assiette, et roule une serviette en papier dans un verre à pied.
Il circule un moment dans l’encadrement de la haute fenêtre, puis disparaît, tandis que l’autre baie vitrée s’illumine d’une lampe jaune pâle. C’est celle du salon, où l’homme s’installe dans un fauteuil pour lire. Il finit le thé froid oublié sur le coin du guéridon. Son regard se perd à travers la vitre et la rue endormie.
Il fait une grimace — qui retrousse son nez et écarte ses yeux — lorsqu’au fond de la tasse il trouve un reste de sucre : une saveur du passé, comme une douceur disparue.