La femme au balcon XLII

30.4.22

Toutes les fenêtres sont ouvertes, aujourd’hui. Les intérieurs s’aèrent et les balcons ont pour un temps laissé tomber leur fonction de sas. Je vois chez les voisins d’en face quasiment comme chez moi.
Vient au balcon l’homme du second étage. Il étend son linge : chemise, pantalon puis par-dessus un grand drap blanc qui descend presque jusqu’à la fenêtre de la femme du premier, « ma » femme au balcon. 
Vient au troisième une vieille dame et une bassine remplie d’eau mousseuse ; voilà qu’elle y trempe mi-bas et culottes, remue, tape son petit linge comme le faisait autrefois ma grand-mère au lavoir du village.
Vient ma voisine à demi-cachée  par le bas du drap qui balance au-dessus de son balcon. Il fait des petits flap-flaps dans le vent, se lève puis retombe, masquant puis démasquant son visage. 
Rentre l’homme du second alors que le drap ne tient plus que par une épingle et glisse encore un peu plus dans la rue.  
Rentre la dame du troisième et sa bassine d’eau tiède. Un peu d’eau savonneuse coule le long du mur, quelques bulles éclatent sur les moulures. 
Rentre ma voisine qui en a assez de jouer à cache-cache avec le drap. Drap qui, peu de temps après son départ, finit par tomber sur son balcon.
Une odeur de lavande prend la rue à témoin. C’est le vrai printemps qui s’installe.

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