De l’inutilité d’être

10.10.25

De l’enfance, je retiens l’inutilité d’être parmi les gens, posé là, entre un canapé et une table basse, à faire courir un monde de jouets aux couleurs irréelles.
Ma vision, trop basse et toujours axée sur les hanches de ma mère, scindait l’espace en deux : en bas, un ballet de longues jambes animées par un grand et invisible marionnettiste ; plus haut, un univers de formes et de sons plus intrigants les uns que les autres.
Tout sonnait faux, et les images — la représentation des choses mêmes — ne parvenaient pas à faire leur chemin de clarté.
Quelqu’un, quelque part, lançait des intentions qui jamais n’atteignaient leur cible : des mots, des actes, des silences incompréhensibles, lourds à porter sous un crâne dont la fontanelle ne voulait pas se refermer.
Les heures avaient ce poids, ce mystère des grands, cette impuissance dans le grand chaos qui semblait régir la vie.

2020

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