La femme au balcon XV

17.2.22

Il fait doux ce matin. Contrairement à la femme au balcon, je fume d’habitude à l’intérieur. Je sais, c’est mal. Mais après tout, je n’empoisonne que moi. Il fait doux ce matin et j’ai envie de sortir sur mon balcon pour fumer mais aussi pour prendre un peu de lumière. Je sors et elle apparaît dans l’encadrement de sa fenêtre juste au moment où j’allume ma cigarette. Comme si elle savait que ce matin, je serais là. Elle m’attendait même, peut-être.
Elle sort à son tour. Nous voilà chacun à son balcon. Un bonjour vient s’écraser dans la rue. Un bonjour prononcé par nous deux quasiment en même temps. Un bonjour de convenance, un bonjour de gêne. Puis le silence étrange de la rue, elle si souvent animée et bruyante. Nous tirons sur nos cigarettes. Nos deux profils se toisent. Le malaise est palpable. J’aimerais qu’un bruit nous distraie, qu’une voiture passe, qu’un passant éternue. N’importe quoi. Que quelque chose, quelqu’un nous arrache un début de discussion. Mais rien. Le temps s’allonge. Nos cigarettes sont deux éternités égarées.
On rentre enfin tous les deux dans un même mouvement après avoir écrasé nos mégots dans le même soulagement. Nos fenêtres claquent et les bruits de la rue recommencent comme des rires gras sous de faux applaudissements de sitcom.

Dans le même tiroir