facebook : Le roman d’Arnaud – C’est parti !

Le roman d'Arnaud - la couv

Le roman d’Arnaud, expérience d’écriture 2.0 sur Facebook, débute ce soir à 18h30.
Tout au long de la soirée d’Halloween, nous allons posté 10 statuts de 420 caractères. Préparez-vous, installez vous confortablement, fermez vos portes et volets, et couchez les enfants : ça va saigner !

En exclu pour les blogs, voici le synopsis de l’histoire la plus web 2.0 de votre vie :

Réfugié depuis son enfance dans le grenier de sa grand-mère, une vieille femme acariâtre, Arnaud cache sa laideur aux yeux du monde.
A l'abri du regard des autres dans sa forteresse d'encre et de papier, passionné par les livres et la lecture, Arnaud vit sa vie par procuration, en s'identifiant aux héros des romans qu'il lit et relit inlassablement. Il ne sort jamais de son grenier, sauf pour aller rencontrer un vieux libraire intriguant avec lequel il s'est lié d'amitié et qui lui suggère à chaque fois de pertinentes lectures. Mais plus les jours passent et plus Arnaud se rend compte que ses lectures et ses livres ne suffisent plus à apaiser sa solitude qui le ronge de l'intérieur.
L'âme en peine, le jour de son 30e anniversaire, Arnaud se rend chez son libraire qui va lui offrir un livre aux pouvoirs étranges. Arnaud va vivre alors une expérience qui va changer le cours de son existence et semer la terreur, malgré lui.
Le Roman d'Arnaud, c'est l'histoire d'une transformation intérieure et extérieure spectaculaire qui incite le lecteur à réfléchir sur les thèmes de l'enfermement, de l'insatisfaction, le jeu des apparences, de l'être et du paraître, des peurs face aux changements et aux remises en question qui rythment nos vies.


Avertissement:
Nous tenons à informer les futurs participants à cette expérience de lecture numérique 2.0 que nous ne serions, en aucun cas, être tenus pour responsables des conséquences de ce que vous lirez. De même, nous vous suggérons de réfléchir à deux fois avant de penser ou d'écrire du mal sur autrui. Nous vous rappelons, également, que les gousses d'ail, crucifix, flèches d'argent et autres talismans, bien que non fournis, sont fortement conseillés tout au long de cette expérience.
Fin de l'avertissement.


Les trois auteurs
Jean-François Gayrard, le cerveau 2.0 de cette expérience de lecture
Gwen Català, le metteur en mot 2.0 et en image
Christophe Sanchez, bloggeur impénitent et faiseur de phrases 2.0

Je tiens d’ores et déjà à remercier tous ceux qui ont cité et relayé cette aventure depuis le 06 octobre : Nicolas, Gaël, Dedalus, Le lecteur hypothétique, Sylvie, Blog du modérateur, Numerikbook, Hélia le blog, Aldus, ebouquin, daily-tube, Actu-litté et bien sûr Leezam Stories qui éditera le roman d’Arnaud au format iPhone et epub courant novembre. Il convient bien évidemment de rajouter les retwitteurs et partageurs facebook, vous vous reconnaitrez… Merci à tous !

Je veux suivre Arnaud

  • 31.10.09

Mon jardin se crée

Je me retire dans mon jardin secret pour me duper, pour m’oublier. J’intime à Eve que mon jardin d’Eden refuse malice et dédain. Festif, je joue de ma garden party pour retrouvrer joie et pitrerie. Au delà, je laisse mon jardin jachère pour apprécier le néant de mon ère. Et quand mon lot peint de terre glaise me gagne, je m'enduis de boue avec aise. Mais toujours, mon jardin se crée et surtout, ne jamais me l'éclairer.
30/04/09 - D’à peu prés le jeu d’écriture de feu « histoire de fous ».

  • 30.10.09

A bicyclette

Etonnant engin que le vélo. Il traverse les âges sans perturbation et devient même, depuis l’avènement des années écolo, le moyen de transport à privilégier dans nos cités polluées. Pour moi, il n’a jamais été synonyme de moyen de transport mais plutôt de liberté et d’évasion.

Mon premier tricycle rouge à roulettes m’a emmené sur les quais du Vernazobres. Trop petit, je ne dépassais pas le muret qui bordait la rivière. De ce fait, personne ne m’apercevait sur l’autre rive. Il me fallait donner de la pédale pour atteindre une vitesse correcte, 5 à 6 kms environ ; si bien que les personnes âgées de la maison de retraite d’en face, bien qu’équipées de déambulateurs, pouvaient me doubler sans problème. Cependant, au bout du quai, essoufflé, je regardais la distance parcourue et j’étais fier de m’être ainsi éloigné de plusieurs dizaines de mètres de la maison.

Plus tard, mes parents m’offrirent un mini-vélo. Rouge aussi. Exit les petites roulettes, je pouvais alors atteindre des vitesses astronomiques et passer le pont de la rivière pour découvrir le village sous toutes ses coutures. Elégant, pliable donc facilement transportable, il se casait sans problème dans le coffre de la Renault 16. Je pouvais le dimanche accompagner papa à la cueillette aux champignons et dévalait ainsi les pentes abruptes du Caroux. Au pied de la « femme allongée », je scrutais les hauteurs et attendait patiemment que papa redescende me récupérer avec son auto. J’étais seul au milieu de nulle part. J’étais bien.

Très vite, le mini-vélo fut remplacé par un engin motorisé, ma première mobylette. Moins d’efforts et encore plus de liberté. Plus besoin de personne pour m’évader, sortir, fuir aussi. Fendant l’air avec ma bécane de 50cm3, casque au coude et insouciance dans la tête, j’écumais les alentours, faisais des tours et des détours dans les chemins de vigne ou les traverses boueuses.

Mes équipées mécaniques n’ont pas duré longtemps. Alors que mes amis passaient aux cylindrées supérieures, Yamaha 125, Honda 250 , KTM de cross et autres engins de mort, je retrouvais quelques années plus tard le plaisir du vélo. Le VTT avait trouvé ses lettres de noblesses. Avec les nouveaux systèmes de dérailleurs, les pentes de ma petite montagne s’en trouvaient plus faciles et le plaisir décuplé. Aujourd’hui, je suis beaucoup moins cycliste. Pour autant, mon vélo trône toujours dans le hall. Les rares fois où je le sors, je retourne à mes escapades d’enfants et retrouve mon bonheur éprouvé sur les quais et les chemins d’autrefois.
  • 28.10.09

Le roman d'Arnaud J-4

Nous tenons à informer les futurs participants à cette expérience de lecture numérique 2.0 que nous ne serions en aucun cas être tenus pour responsables des conséquences (et il y en aura) de ce que vous lirez.

Le 31 octobre 2009, vivez votre première expérience de lecture numérique en 2.0 avec Le roman d'Arnaud.

A suivre sur Facebook : Le roman d'Arnaud
Découvrez le sypnopsis




  • 27.10.09

Cogito ergo sum

cogito ergo sum - arf Quand arrive le moment de choisir, en réunion avec moi-même, je discute. Je me cause grave, je me vilipende sévère. Puis, au fil d’introspections réelles qui tournent rapidement au fictif, je décide malgré moi. Plus tard, apparaissent confusions en tout genre. Souvent, il s’avère que la décision m’échappe comme si elle avait été prise par un « sur-moi », voire un autre « moi » qui m’est étranger. Soit, je diligente allègrement afin de pousser ainsi le jugement hors de moi, soit, j’use de ma volubilité pour donner justification à mes propos.

Bref, de mon chef ou pas, une décision est une décision, peu importe si elle m’incombe vraiment dans la mesure où je la rends publique. Le problème se complique lorsque le verdict, pourtant unanime (moi et moi s'étant longuement concertés), n’est pas suivi de faits tangibles qui corroboreraient choix et actions. Je m’explique. J’acte puis, je nie avoir acté. Pire, j’argumente pour que de façon intellectuelle et cartésienne mon choix soit indéniable, indiscutable et irrémédiable ; puis, quelques jours plus tard, je trouve les mêmes arguments amenant à réduire en miettes le raisonnement précédent. Il en découle une décision inverse, à prendre ou à laisser. Les deux devenant plausibles, je ne tranche pas.

Le seul fait indiscutable : obsédant et inconstant se retrouvent mes deux participes constamment présents.

Cogito déjà secoué et publié le 1er février 09
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  • 25.10.09

Qu'est ce que je faisais à 23 ans ?

Je suis l'heureux élu d'un tag en règle de la miss epamin' qui fait suite à la chaîne initiée par le faucon et relayée par l'ex-coucou de Marsilargues.

Qu'est ce que je faisais à 23 ans ?
Chaîne en lien étroit, vous l'aurez deviné, avec l’actualité brûlante de ces dernières semaines.

C’était donc en 1992. J’étais encore un jeune con. Je suis encore un peu con parfois mais de source sûre, je ne suis plus jeune. Je venais de terminer mon service militaire. Il était prévu qu’à l’issue de mon devoir obligatoire envers la nation, je me dirige vers une carrière prometteuse au sein de la Poste. Je n’y suis pas allé. Quand je vous dis que j’étais con !

J’ai préféré accepter une proposition d’emploi dans une PME familiale. La dite entreprise était dirigée de main de maître par un charismatique patron d’origine sicilienne,, un self-made man comme on disait dans les années 90. Sa société était prospère grâce à son acharnement au travail et à son bagout rehaussé d’un accent enjôleur. Il était séduisant, accrocheur et avait la faculté extraordinaire de vendre père, mère et autres descendants à quiconque se présentait devant lui. L’argent, le pouvoir, la bonhomie et une certaine générosité finirent par me convaincre.

Son affaire était installée dans ma région alors que mon affectation était prévue pour St Quentin en Yvelines. Je n’ai rien contre les Yvelines mais à choisir entre mon Hérault rayonnant et le Quentin, fut-il un saint, il n’y avait pas photo. Voilà pour l’argument avoué de mon choix. Je le répétais constamment pour contrecarrer les sermons de mes parents qui m’avaient déjà projeté cadre administratif jusqu’à la retraite. J’avais avec brio réussi à les rallier à ma cause. Pourtant, la vraie raison que je n’avais pas cachée longtemps était tout autre. Mon sicilien de patron était en fait aussi mon futur beau-père.

A 23 ans, j’étais donc à l’instar de Jean Sarkozy un parvenu pistonné par le papa de sa fiancée. Comme quoi le népotisme, terme revenu à la mode ces derniers temps, ne date pas d’hier. Par la suite, mon parcours professionnel prit une toute autre tournure mais j’avais été mal à l’aise avec les faveurs qui, en ces temps, m’avaient été consenties.

Je balance la patate chaude à qui veut bien la saisir et entre autres à: lola (oui, encore ! C'est bon pour son blograsme) et Mu Lm.

  • 23.10.09

Des mots niak !

Je me lève et tu ne m’as toujours pas quitté. Tu as l’air boudeuse ce matin alors que je suis ouvert, avec l’envie d’agir, de bouger, de vivre. Inversement hier, tu étais enjouée, fringante, un rien prétentieuse lorsque tu m’as trouvé las, éloigné dans mes pensées, en proie au spleen. Pourquoi somme-nous sans cesse nos meilleurs ennemis ?

Je suis maintenant debout. Bien droit, je te toise et tu disparais quelques minutes avec les débris de ma nuit. Tu t’égares puis reviens avec mes premiers clics sur l’actu du jour pour disparaître sur la lecture des tweets matinaux. Au café, tu t‘immisces dans le creux de mes joues et glisse en rappel entre mes gencives. Je te chasse avec des mots « niak ». Je te jette à la figure mes pensées contrariées.

Sous la douche, tu te tais, tu la ramènes plus. L’eau purifiante t’affole, toi la démone de carbone. Je m’habille, je range, je plie, je trie, je file dans la fraîcheur du petit matin. Pressé par le temps, mon cerveau t’oublie tandis que mon corps se souvient. La journée tourne, vire, s’étire et se raccourcit au son de tes va-et-vient incessants. Tantôt paradisiaque, tantôt dans le feu de l’enfer, tu imposes ta limite en équilibre entre le besoin et l’envie.

Retour le soir dans l’antre protectrice, tu redoubles le manque. Tu feins une nouvelle fois l’absence et pourtant, tu es toujours en moi, insidieuse et divine beauté maléfique. Le crépuscule est propice à de nouvelles attaques pointues entre chien et loup. La nuit apaisante te fait fuir. Tu retournes dans l’oubli à la faveur de mon amnésie nocturne.

Devant l’écran de mes pensées, je te couche, nébuleuse indéfinie, sur une page blanche et je sens en filigrane apparaître ta couleur jaunâtre nauséabonde. J’inspire, je souffle, je te battrai saleté de clope !

Ecrit le 30 mai, depuis, elle a gagné...

  • 21.10.09

Si j’étais…

Aujourd’hui, pour les besoins du Roman d’Arnaud, j’ai fait ma mini-bio. et il m’est revenu à l’esprit un jeu d’écritures que nous avions fait il y a quelques mois avec la bande de blogueurs fous*. Il s’agissait de se sino-portraiturer à tour de rôle. J’aurais bien coller les portraits écrits par les autres mais aujourd’hui le blog où nous officions a été fermé par la patronne. Reste simplement mon portrait à peu prés chinois que j’avais écrit à cette occasion.

si j'étais Si j'étais un objet, j’essaierais d’être le moins encombrant possible mais il faudrait toutefois que l’on me voit : un téléphone mobile extra-slim qui brille. Si j'étais une saison, je devrais être belle et chaude mais dépourvue de nuisibles : un été sans insecte. Si j'étais un plat, je me préparerais et passerais au micro-ondes : une assiette de ravioli  mais des Buitoni hein ? Si j'étais un animal, j’aurais un système pileux développé, je serais futé mais taciturne : un alf.  Si j'étais une chanson, je serais pop rock, un peu brute mais pas trop et le dernier couplet serait doux :  no surprises de Radiohead. Si j'étais une couleur, le vert évidemment mais pas pour l’espoir mais pour l’herbe et son odeur lorsqu’elle est fraîchement coupée. Si j’étais un roman, je serais L'insoutenable légèreté de l'être de Milan Kundera. Si j'étais un personnage de fiction, je serais αяf  bien sur. Si j'étais un film, là, sans hésiter, je serais Le premier jour du reste de ma vie de Rémi Besançon. Si j'étais un dessin animé, je me la jouerais ancêtre de bioman sans les forces de couleurs : « Sankukaï, c’est ma bataille, c’est ma bataille ! ». Si j'étais une arme, je me livrerais en assaut pacifiste mais dévastateur : le regard.
Et pour finir, si j'étais un endroit, je me localiserais indéfiniment, sans  aucun système de positionnement : un ailleurs onirique.

* j’ai quand même mis le lien, dés fois, que ce blog ouvre à nouveau :) 

  • 18.10.09

La première fois que j’ai fait du sexe

Le titre de ce billet peut paraître racoleur. Je ne doute pas qu’il le soit mais il est aussi posé là, à la vue de l’ami Google, à cause d’une réplique de mon fils à sa sœur. La discussion tournait autour d’un « grand » de cinquième qui aurait fait la chose avec sa petite copine de classe. « Et, il a fait du sexe avec elle ? » s’interrogea mon Arthur !

La première fois : c’est aussi l’objet d’une chaîne initiée par Didier Goux et transmise par Madame Zoridae de la Sexualité. Donc, je m’y colle.

Ma première fois ou presque...

J’étais en cinquième au collège Jean Jaurès de mon village. Ce petit établissement regroupait quelque deux cents enfants du bourg. Autant dire que nous étions presque en famille. Tout le monde connaissait tout le monde. Il était d’ailleurs fréquent de se faire appeler directement par le prénom d’un de nos parents, natif du village : le petit de Marcel, la petite à René etc. Nous étions la progéniture locale, héritière du patrimoine social et rural de nos parents.

La petite à Gilbert me tournait autour depuis quelque temps. Elle était à Gilbert et elle était vraiment petite. Elle ne parlait pas beaucoup, restait d’une allure banale et ne provoquait en moi aucun émoi. J’avais 13 ans à peine, en éprouvais-je vraiment pour quelqu’une d’autre ? Son minois était pale, entouré de petites tâches brunes. Elle portait souvent une jupe verte « en rideaux ». J’utilisais cette expression un peu moqueuse à cause de la ressemblance du tissu avec les tentures entourant la fenêtre de notre salle à manger. Une espèce de cotonnade bordée de velours côtelé que je m’amusais souvent à caresser du doigt. Les rebonds et pliures que provoquait mon frottement me faisaient passer le temps lorsque j’étais perdu dans mes pensées.

Il se trouvait que Gilbert et sa famille étaient nos voisins. Je voyais souvent sa petite, je la retrouvais dans ma rue. Un jour, nous étions tous les deux assis sur le banc public qui fait face à nos deux maisons. Je parlais, elle m’écoutait sans un mot. Ses yeux trahissaient son émotion. Elle semblait troublée et cela me troublait. Pris de panique par son regard appuyé, je pris instinctivement sa jupe pour mes rideaux. Tandis que je roulais le tissu sous mes doigts, je ne vis pas que le vêtement remontait sur ses cuisses dévoilant les dessous de la demoiselle aux éventuels passants. Elle se laissa faire puis saisit mon autre main sans rien dire, m’intimant de la suivre.

A quelques mètres de chez nous, une maison abandonnée offrait un recoin idéal entre deux murs à moitié détruits. Son regard était devenu éloquent. Son excitation était palpable. Ma panique m’invitait à ne plus palper quoi que ce soit. A même le sol, à l’abri des regards, les deux murs nous laissaient à peine la place de s’asseoir. Nous nous assîmes d’ailleurs pas. Elle me plaqua contre terre, me sauta dessus, dégrafa ma braguette d’une main en appuyant l’autre sur mon épaule. J’étais agréablement piégé. Je n’ai résisté que très peu de temps. Nos bouches jointes, elle fit glisser de bas en haut sa jupe-rideau contre mon bas-ventre, provoquant irrémédiablement une belle turgescence de mon appendice viril. Les ébats ne durèrent que quelques minutes avant que nos barrières vestimentaires ne disparaissent complètement. Nus comme des vers à l’heure de l’apéro et en plein été, j’étais à deux doigts de me faire dépuceler.

J’avais chaud. Je sentais le poids de son corps sur le mien plus frêle. Il m’oppressait. Ses taches de rousseurs que j’aperçus entre deux clignements de mes yeux hagards m’affolèrent. Je ne la trouvais pas jolie et j’étais embarrassé. La petite à Gilbert m’excitait mais je ne la désirais pas. Était-il vraiment temps à faire la fine bouche sachant que la sienne s’approchait dangereusement de mon intimité ? Elle posa ses lèvres et tout s’évanouit. Une décharge d’adrénaline s’empara alors de mon corps me faisant tressaillir de la tête aux pieds. Elle se recula brusquement évitant ainsi l’éruption sur le vert de sa robe, puis m’adressa un grand sourire espiègle. Elle se releva me laissant gisant sur le sol, la queue entre les jambes. J’avais honte et je voyais le rouge sur mon visage comme s’il se reflétait sur ses dents blanches.

Nous n’avions échangé aucun mot depuis l’emballement de la situation. Elle m’aida à me redresser puis regroupa nos vêtements éparpillés. Une fois revêtus, nous rentrâmes toujours muets main dans la main. Entre nos deux maisons, elle se retourna vers moi, m’embrassa sur la joue et m’invita pour le lendemain à son dix-huitième anniversaire.

Nombreux sont ceux qui ont déjà participé à cette chaîne. Pour ne citer que ceux que j’ai aperçu ou lu : Olivier P., Dorham, Poison-Social, Nefisa, Suzanne, Pierre Robes-Roule, Nicolas, Manutara, Zoridae et Didier Goux, cités plus haut.

Je souhaiterais néanmoins lire la première fois de : elle-c-dit, lola et babel. Oui, je ne cite pas d’hommes !

  • 16.10.09

Lire numérique - La chaîne d'Arnaud

image Comme un n’arf qui blogue en web deux et bien je m’auto-tague ! Je peux, je suis plusieurs alors j’en profite ! J’ai lancé sur le n’arf II une chaîne à l’occasion du démarrage prochain du Roman d’Arnaud. Piqûre de rappel pour ceux à qui ça aurait encore échappé :

"Le Roman d’Arnaud est une expérience de lecture 2.0 qui s’appuie sur le principe de l’édition numérique et du Web 2.0. L’expérience va débuter le 31 octobre 2009. Pendant 40 jours et 40 nuits, trois auteurs vont se relayer pour écrire un roman d’un nouveau genre sur Facebook en offrant la possibilité aux lecteurs d’interagir au fur et à mesure que l’intrigue leur sera dévoilée.”

 
Revenons à la chaîne avec trois petites questions sur ce sujet passionnant de l’édition numérique :
  1. Lisez vous des livres sur écran ?
  2. Si oui, quel type de publication ?
  3. Si non, pourquoi ?
Oui, je lis sur écran. D’ailleurs, je ne fais que ça. Comme je l’ai déjà expliqué lors d’un précédent tag portant sur l’écriture au féminin, je ne lis pas de livres papiers à la bonne odeur de carton poussiéreux. Je le regrette parfois mais c’est ainsi. Je ne me suis pas laissé aller à la lecture tranquille allongé sur mon lit, sur un canapé ou au soleil. Non, je lis devant mon écran vos blogs, des articles de presse en ligne mais pas encore de livres. Quand Jean François Gayrard m’a proposé l’aventure du Roman d’Arnaud, je suivais déjà ses activités sur son blog numerikbook. Il suit de très prés la montée en puissance de l’édition numérique et m’a ouvert de nouveaux horizons de lecture sur iPhone, eBook et autres terminaux nomades. Il m’a convaincu, d’une part, de participer à l’écriture de ce roman d’un nouveau genre et d’autre part que la lecture numérique était non seulement possible mais aussi inévitable.
 
En effet, la génération Y, comme on se doit aujourd’hui de l’appeler, partage son temps libre entre l’écran de son ordinateur, la console de jeux et la télévision. La place du livre traditionnel, même si je me garde bien de le critiquer, est devenue réduite, non par désintérêt mais à cause d’un changement de priorités. L’interactivité, le partage et l’envie de socialisation par l’adhésion à un groupe sont autant de facteurs ludiques et chronophages qui relèguent les bons vieux livres entre deux presse-papiers sur une étagère.

La découverte de la lecture et surtout de nos grands auteurs passe de toute évidence par le livre. Si les éditeurs veulent capter un nouveau marché, c’est bien sur les supports numériques qu’il se trouve. Le but in-fine est bien entendu de canaliser l’attention des non-lecteurs en leur proposant un ouvrage ouvert sur leurs envies, dans lequel ils pourront eux-mêmes s’investir et commenter l’histoire. Voilà, entre autres, un des enjeux du roman d’Arnaud.
 
Je suis convaincu qu’une nouvelle façon d’écrire et de lire est entrain de naître dont le numérique sera le support. Elle ne remplacera pas le livre mais lui donnera une forte valeur ajoutée. Le support papier induit le livre, le support numérique induit l’échange la rapidité et l’accessibilité. Il s'agit maintenant de (ré)concilier ses deux univers parallèles.
 
Vous pouvez déjà lire l’avis de dedalus sur son billet évocateur : de la frigidité de l’édition numérique. J’aimerai bien lire sur ce sujet : Sylvie, Zoridae, FalconHill, et Philippe. A vos claviers !

Pour suivre, le roman d’Arnaud, c’est sur facebook et twitter

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  • 14.10.09

flux d’expressions toutes faites

expressions toutes faites Si j’avais des doigts de fée, je tisserais forces et faiblesses avec une acuité plus fine. Mais voilà, je suis maladroit. Je ne perçois rien de mes mains même si j’affûte mes yeux de lynx pour donner dextérité à mes gestes. Tiens, en parlant du fauve aux yeux clairvoyants, je les ai (les yeux) souvent plus gros que le ventre. Imaginons un instant des mirettes de cette taille, il est facile de convenir qu’ils font piètre figure sur le faciès du prétendu lynx.

J’intellectualise mais n’agis pas. Le reste, je ne le vois pas ou peu. De toute façon, ça ne m’intéresse pas. Et dans cet état, je suis une case vide dans une cervelle d’oiseau. J’ai un grain, un petit vélo dans la tête qui tourne vite et déraille souvent. Et c'est là que le bât blesse, car de main de maître, je m’effondre tout en agitant avec brio mes ajournements du cervelet. Bref, je suis bête à manger du foin.

D’autres sont forts comme des Turcs et arrêtent rapidement de se faire eux-mêmes tourner en bourrique. Chacun son talon d’Achille, le mien, c’est la masturbation cérébrale. Ô je pourrais me mentir comme un arracheur de dents. Je sais le faire. Je pourrais feindre l’ignorance et faire comme si je ne voyais pas plus loin que le bout du mon nez. Je sais faire l’idiot. Cependant mon petit doigt me dit qu’un jour, il va falloir que je réagisse.

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  • 12.10.09

Compter les éclairs

image Quand j’étais petit n’arf, les soirs d’orage étaient des instants aussi terrifiants que fascinants. Lorsque je dormais chez ma grand-mère, celle-ci me contait inlassablement la même légende urbaine. D’après elle, ma peur pouvait s'amoindrir en usant d’un truc imparable. Pour te rassurer, me disait-elle, tu n’as qu’à compter dans ta tête les secondes qui s’écoulent entre l’éclair et le fracas du tonnerre. Si tu dénombres plus de dix secondes, n’aie pas peur, l’orage est loin et tu ne crains rien. Mais s’il y a moins de dix secondes, Mamé, pensais-je si fort qu’elle m’entendait. Tu es presque un homme maintenant et un homme ne craint pas l’orage. Ma virilité supposée ne laissait donc pas de place à l’angoisse.

Ma grand-mère habitait une modeste maison de village avec, au 1er étage, une chambre exigüe cachée dans un recoin du palier. Elle était destinée aux petits-enfants de passage. Le soir, elle me préparait une bouillotte, même en été. Une brique rouge chauffée au feu de cheminée et entourée d’un épais linge était ainsi enfournée sous l’édredon moelleux, juste au pied du lit. Je me glissais dans les draps en veillant à ne pas déborder ma couche soigneusement préparée. Je grimpais puis me mettais debout sur la tête de lit et je me laissais glisser sous l’épaisse couette de plumes jusqu’à toucher de mes pieds la pierre chaleureuse.

Ainsi protégé, j’oubliais presque l’orage quand un éclair sans bruit traversait les vieux volets vermoulus. Vite, je comptais. Un, deux, trois … jusqu’à dix. Et à onze, un grondement lointain retentissait. J’entendais alors les pas légers de ma grand-mère s’éloignaient. Certainement avait-elle aussi compté avec moi, cachée derrière la porte. La lumière du couloir s’éteignait et je pouvais m’endormir.

Avant hier soir, il a fait un gros orage. J’ai pensé à ma petite « mamé » aux cheveux blancs tirés. Aujourd’hui, Clara, ma fille, m’a expliqué que sa maîtresse lui avait enseigné comment compter les éclairs.

Photo : éclairs by night antarés

  • 10.10.09

Mots de blogs (5)

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Eric Mainville démystifie l’internet. Le merle moqueur m’émeut. Lusoncle me poétise. Balmeyer simule et l’intarrissable Didier Goux se joue des mots.

Nouvelle tranche de blogs :

On reste étonné qu'en en soit encore à diaboliser Internet, à dépeindre la réalité en noir ou en blanc, comme si le salut ou la perdition dépendait d'un outil, aussi puissant soit-il, comme l'est Internet.
Crise dans les médias Ceux qui diabolisent Internet

Guénolé marche depuis deux jours. On dirait qu'il n'a fait que ça toute sa vie. Pour se reposer des malheurs du monde, il faut regarder un enfant qui vient d'inventer la marche. Il tombe, se relève sans avoir le temps de pleurer; Guénolé marche marche marche...
Le merle moqueur Après midi d’automne

Dans la houle, arrimer le vague... Ni fait, ni à faire, fait et à faire. Flux continu et sortie des alignements michauxiens… Un petit moment dans la moiteur sans clim, Les bassins attracteurs fonctionnent quand même, Flux et reflux sur le danger du bonheur…
Lusoncle Une épopée

Le premier métier de feu l'acteur Sim était extraordinaire : il débuta durcisseur de tétons au Crazy Horse. Encaissant cette information à la radio, je cessai toute activité pour plonger dans une rêverie mélancolique. Cette tâche improbable consistait à, muni d'un seau à glaçons, frotter la poitrine des danseuses avant leur entrée en scène, pour bien mettre en exergue leurs tétins triomphants.
Balmeyer Le durcisseur

Il s'est trouvé qu'entrant dans Pacy j'ai croisé une affiche publicitaire immobile, vantant un prochain spectacle d'otaries vivantes. J'ai aussitôt cherché à imaginer à quoi pourrait bien ressembler un spectacle d'otaries mortes – j'ai rapidement renoncé.
Didier Goux Histoire d’otarie puis d’eau tarie

  • 10.10.09

Le roman d’Arnaud

Il y a quelques jours l’ami facebookien à tendance tweetique Jean François GAYRARD m’expose son projet d’édition numérique. Il faut dire que le garçon évolue, comme un poisson dans l’eau, dans cette sphère encore balbutiante en France. Il vulgarise, évangélise les foules sur son blog numerikbook, sur sa page facebook, la bibliothèque numérique, et all around the web via nos chers médias sociaux.

Son projet m’a instantanément accroché. Il s’agit de publier un roman sur le grand livre des visages. Il m’envoie le sypnopsis et m'explique brièvement sa vision. Le roman d’Arnaud est né. Trois auteurs, Jean François, Gwen Catalá et moi-même allons pendant 40 jours et 40 nuits (euh! moi je dors la nuit, c’est les deux autres qui vont bosser) écrire sur la page facebook dédiée la vie torturée d’Arnaud entre malaise existentiel et rebondissements fantastiques.

Ci-dessous, un teaser concocté par Jean François pour vous donner envie de nous suivre, car un livre même numérique sans lecteur, ça sert à rien. Pour vous abonner à la page facebook, vous avez le widget fan dans la barre latérale de ce blog,

Bonne lecture !

Cette année, Halloween entre dans l'ère numérique. Le 31 octobre 2009, la peur et l'inquiétude vont s'emparer de Facebook, pour votre plus grand plaisir. Vivez votre première expérience de lecture numérique en 2.0 avec Le roman d'Arnaud. ...




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  • 7.10.09

Lettre à un inconnu

Les vases communicants sont des moments de rencontres, de découverte de nouveaux univers, d’autres blogs, d’autres écritures. La session de vendredi dernier a été très riche. J’ai décompté 11 échanges, soit 22 textes. Je me suis notamment arrêté sur le billet de Pascale Petit auteure et blogueuse sur Tors-up qui a échangé avec Anna de Sandre de Biffures chroniques. Il s’agit d’une annonce étonnante d’un homme à une femme inconnue. Je vous invite bien sûr à lire ce billet avant de lire la suite. J’ai commenté en lançant l’idée qu’une réponse à cette annonce serait sympathique. J’ai dans un permier temps refusé de le faire moi-même prétextant que je n’étais qu’un diariste (j’aime pas ce mot, trop proche de « diarrhée »), homme bien incapable de faire un tel exercice. Puis, j’ai échangé avec une fidèle lectrice sur ce sujet, j’ai réfléchi et me suis essayé à une courte lettre de réponse.

La voici :

Cher inconnu,

Je suis à la fois surprise et émue par cette annonce détaillée de nos déplacements parallèles. Quelle étrangeté de se savoir ainsi suivie, épiée peut être, appréciée certainement. Appréciée comme le granizado avec le goût surprenant de mon voyage dans vos mots. Déjà quelques jours que je suis rentrée sur Paris et pour tout vous dire, j’ai croisé votre regard sans percevoir si ces œillades m’étaient adressées. J’étais troublée.

Vous sembliez désespérément seul sous vos lunettes noires. Malgré vos ostensibles huées dont je connais aujourd’hui la raison, vous paraissiez hors contexte, comme étranger à ce vieux Barcelone que j’affectionne. Voilà pourquoi je vous ai remarqué. Oui, Monsieur, je vous ai vu, perçu, senti mais pas abordé. Comment aurais-je pu le faire, comment auriez-vous pu le faire ? Puis, il m’a semblé oublier.

Le reste de mes déplacements ne vous a pas échappé et pourtant, moi, je vous ai perdu. Je ne vous ai pas vu sur la plage, ni même en garçon de café, pas plus aujourd’hui dans le secret du métro. Je me suis égarée, Monsieur. Je vous cherchais sans le savoir. C’était bien vous, sous vos lunettes noires, l’objet oppressant de mes pensées. Alors, je me suis plongé dans le bleu du ciel, de Biarritz à St Malo pour enfin regagner le gris de Paris. Oui, j’ai fait semblant d’aimer. Pourquoi ne pas s’être rencontrés ?

Alors, Cher Yann, si vous me suivez toujours, j’ai acheté un nouveau chien. Si vous êtes encore là prés de moi à guetter les mots que je vous glisse, je ne fais plus semblant d’aimer. Si vous avez envie de marcher à mes côtés dans les allées de Vincennes, nous pourrions faire courir le chien ou tout simplement fumer. J’y serai tous les jours. Je porterai un bustier bleu et une jupe de la même couleur.


Photo : zphotos gene249

  • 5.10.09

La méthode Lambert

Je travaillais la porte quand l’interphone a sonné à l’intérieur.

Personne n’allait répondre puisque personne n’était à l’intérieur. C’était Dan qui m’avait passé les infos. Il a le quartier dans sa poche. L’info, c’est la phase numéro un de la méthode Lambert et Lambert, c’est moi. Ma méthode, j’ai pas pu la protéger, le bureau des brevets la refuserait, elle le mérite pourtant. La phase deux, c’est le demi cure-dent. Je le coince dans le bouton de la sonnette, je planque cinq minutes et je reviens discrétos. Aucun être humain ne résiste à cinq minutes de sonnette.

Faut vous dire que je travaille en solo. Ca aussi, c’est ma méthode : je partage les cure-dents en deux mais le butin, pas question. Ni qu’un compère, qu’un complice ou qu’un con quelque chose me bave sur les noyaux. Je suis un atrabilaire, un introverti, un misanthrope point n’en faut. Le binôme, c’est non. Au risque de travailler sans filet, en flux tendus, de me cogner le boulot de deux. Alors quand ça anicroche comme cette sonnette dans l’appart, j’ai pas de recours, je suis le cou dans la merde.

* * * * *

Je sonne en vain.

Elle doit être sourde. Elles sont toutes sourdes à cet âge. Comme des pots de crème à lifter. Alors elles poussent leur téléviseur à fond. Résultat, elles entendent encore moins. Me serais-je donc transporté en vain ? Car dans mon travail, on se transporte. Doux Jésus. Saint Marc, patron des notaires, des huissiers et de leurs dévoués clercs.

Fort heureusement, le contexte, entendez le voisinage, nous aide parfois. Comme cette brave jeune fille qui arrive poussant une poussette. Elle gagne ainsi quelqu’argent, emmenant les enfants à l’école et retournant les chercher. Nous discutons dans l’ascenseur. Elle est étudiante. En droit, voyez-vous ça. Je n’évoque pas les raisons de ma présence. Je m’en tiens toujours, a fortiori lorsque je suis en mission, à la déontologie de ma profession. Connaissez-vous les trois règles de mon métier ? Discrétion, discrétion, discrétion.

* * * *

Les deux mamelles de la méthode Lambert : célérité, adaptabilité. Tel un joueur de bonneteau, je replie tout en trois secondes. Les tournevis, les pinces, le jeu de passes. Je redeviens agent d’assurances : costard-cravate, attaché-case simili cuir, juste assez ridicule pour qu’on me prenne pour ce que je ne suis pas. Je file dans la montée d’escalier.

La porte de l’ascenseur s’ouvre. Se referme. Des pas. La sonnette du palier retentit. Rien, évidemment, puisqu’il n’y a personne dedans. L’andouille, il insiste. Il toque maintenant, il cogne, il va attirer l’attention le con. Il me lasse.

Plus rien, le silence. Enfin ! Il s’est calmé le bourricot.

J’attends encore un instant pour refaire mon entrée sur scène.

Mais, tout à coup, ce silence me brasse. Qu’est-ce qu’il branle ? Je n’ai pas entendu l’ascenseur repartir, ni des pas dans l’escalier. Doucement, je pose mon attaché-case et je descends les escaliers un à un, sur la pointe des pieds.

Je tends la tête.

Merde !

Plus personne travaille comme ça !

* * * * *

Et voilà le travail. Ni vu, ni connu. Simple comme bonjour.

J’accomplis toujours ma mission. Quoi qu’il arrive. J’ai le meilleur taux de pénétration de toute l’étude. Mes collègues voudraient connaître mon secret. Ils peuvent se la mettre sur l’oreille et se la fumer : motus et bouche cousue, discrétion, discrétion, discrétion. Je garde mes secrets de travail. Chacun ses méthodes, moi, c’est le film radio.

J’ai appris à l’hôpital. J’avais vingt-trois ans, en pleine maîtrise de droit, un accident de ski. La jambe désintégrée jusqu’à la cuisse. Des dizaines d’examens. Deux mois de lit en extension avec le contrepoids. Après, des semaines de rééducation. C'est là où j'ai été formé à l’utilisation des films radios par mon voisin de chambre. Il était dans la partie.

Pour le ski, c’était fini. Pour pas mal d’autres choses aussi. Je n’ai jamais remarché normalement. A la place, j’ai bûché, j’ai arpenté les couloirs des facs de droit avec ma béquille. Puis ceux de l’étude et de la vie. Je voulais ma place au soleil même si, privé d’ozone, le soleil lui-même devenait dangereux.

Quand j’ai ouvert la porte, la vision qui s’est offerte à moi ne m’a pas étonnée. Des meubles partout. Jusque dans le couloir. J’ai l’habitude. Les bouches des vieilles sont vides mais leurs appartements débordent.

* * * * *

Le salaud ! Il a refermé la porte sur lui.

Lambert ne va pas se laisser spolier ! Lambert ne partage pas ! J’étais là avant lui.

Ni une, ni deux, plus de méthode Lambert qui tienne : j’appuie sur le bouton de la sonnette. Je vais monter au front. Contre attaquer. Reprendre la main.

Un bruit de pas à l’intérieur qui s’approchent. La porte s’ouvre. Un homme me tend la main, il porte un noeud papillon.

– Cher Confrère, enchanté, je suis Maître Corvisard.

Ce ne peut pas être lui qui vient de violenter cette porte ! Pas empapilloné comme ça ! Je le crois pas.

– Maître Lambert, lui fais-je du tac au tac.

– Nous sommes là pour la même raison, je suppose, cher Collègue, me fait-il avec un grand sourire.

Dans sa bouche, luit l’or d’une dent couronnée.

* * * * *

Quand on a sonné, je venais de découvrir la vieille dans la dernière chambre, tout au fond de l’appartement, au bout du long couloir encombré de commodes et d’étagères. Elle était assise dans un grand fauteuil à bascule. Tout d’abord, je ne l’avais pas remarquée, elle était si menue que je l’avais prise pour l’un de ces longs coussins qui servent de décoration.

En entendant cette sonnette, je me suis pris à espérer dans l’arrivée d’un membre de la famille, de l’entourage, quelqu’un qui pourrait me servir de témoin. C’est toujours mieux. Quand on dresse un procès-verbal de saisie à un vieux, il faut reconnaître que l’on est border line. « Pas en possession de tous leurs moyens », arguent les héritiers et ils nous poursuivent devant les tribunaux de leur courroux filial. Ca fait des complications dont on se passerait bien avec tout le travail que l’on a. En ces périodes de crise, nous sommes une profession sinistrée, submergée par le papier, les recours, les saisines, les séquestres, nous croulons sous les heures supplémentaires, nous sommes épuisés.

J’allai donc ouvrir avec enthousiasme.

C’était Lambert !

* * * * *

Ca puait la naphta dans la couloir. J’adore cette odeur, elle me fait craquer comme un gosse. Quand elle parfume c’est qu’il y a de la thune, de l’oseille, du beurre, de la braise, de l’avoine, du bifton neuf grand format, des tableaux encadrés, du bijou de famille, de la fourrure naturelle. Du qui se revend, se fourgue, se monnaye. Même que des fois, je me cogne plusieurs voyages jusqu’au Kangoo.

Ce salaud portait un pantalons à carreaux. Des carreaux vert bouteille bordés d’un double liseré bleu et jeune. Quand le comble du ridicule est atteint, ça devient autre chose. De l’élégance. Moi, à ce jeu, je suis hors jeu.

J’en ai eu marre de son train de sénateur du Pas-de-Calais, j’avais envie de savoir, de reprendre l’initiative : alors j’ai foncé. Mais quand j’ai pénétré dans la chambre, je suis entré dans le pays de la Cologne.

Maman, voilà ce que cela me fait à chaque fois ce parfum.

Pauvre maman partie dans cet accident de voiture par ma faute. Je conduisais trop vite, on va toujours trop vite quand on a vingt ans. Alors, chaque fois que j’encaisse une vieille qui s’eau de Cologne, j’y repense et j’ai trop la honte.

Mais le taff, c’est le taff et moi, question boulot, je suis un pro.

* * * * *

Lambert ne m’avait pas reconnu.

A l’hôpital, une trentaine d’années plus tôt, nous avions pourtant passé de longues semaines côte-à-côte, partageant les mêmes émissions de télévision, les mêmes repas, les mêmes infirmières. On avait vingt ans et on allait s’élancer dans la vie à cloche pied, sur nos béquilles, dans nos fauteuils roulants. On avait beaucoup discuté, de tout, on avait tout notre temps. Je lui avais enseigné les rudiments du droit pénal, ça l’intéressait beaucoup. En échange, il m’avait appris à ouvrir les serrures, les pênes, les gâches, tout ce qui enferme, protège, scelle. Je dois dire que cela m’a été fort utile dans ma profession.

Que faisait-il donc ici ? S’était-il reconverti dans le droit ? Ou était-il parent avec cette petite vieille ? Je n’ai pas eu le temps de me poser davantage de questions parce que, tout d’un coup, mon Lambert m’a bousculé et a galopé dans la chambre.

* * * * *

Clown ! Scélérat ! Bouffon ! Je vais pas me laisser dépouiller par ce rapace de sa race. Me laisser tondre la laine sur le dos. Il faudrait que je reste là, roubignolles ballantes, pendant qu’il m’enfume avec sa tchache lénifiante. Merde pour la méthode Lambert ! L’heure n’est plus au pinaillage ! A l’assaut ! Sus aux bagouzes, aux boucles d’oreille, aux chaînes en or, aux gourmettes, aux broches, aux camées, aux perles de culture. A l’abordage Lambert !

* * * * *

Nous sommes assis sur le bord du lit, tous les deux, abattus, désolés.

Nous nous tenons serré, chacun a passé son bras sur l’épaule de l’autre. Nous sommes encore sous le coup, nous avons besoin de nous soutenir. Nous sommes deux êtres humains face au côté obscur de la vie, à son implacable atrocité.

Longtemps, nous contemplons ce qui reste de la vieille.

Un tas de poussière.

Elle était morte depuis longtemps.

Dans l’indifférence générale.

Sans nous, elle aurait pu rester ainsi des mois et des années.

Il a suffi de la toucher pour qu’elle se désintègre, il en restait si peu, une cendre de cigarette. Au fil du temps indifférent à sa petite vie arrêtée de souris, elle s’est auto-incinérée.

Nous levons les yeux en même temps et nous nous voyons dans le miroir de l’armoire normande.

Nous nous ressemblons. Nous travaillons de la même façon, avec la même méthode, la méthode Lambert : je sonne, tu sonnes, nous sonnons ; nous entrons de gré ou de force, en loucedé ou sur les patins à glace de la loi, pour accomplir notre besogne ; nous préemptons, trions, choisissons le meilleur, prélevons notre taxe, notre dîme. Comme les fourmis carnivores, nous nettoyons jusqu’à l’os.

Nous sommes utiles à la collectivité. Et parfois, comme aujourd’hui, nous sauvons des morts de l’oubli, pour qu’ils existent à nouveau dans l’esprit des humains durant quelques temps. Au fond, nous faisons le même métier, un métier bien difficile, ingrat, solitaire, sans grande reconnaissance professionnelle ni sociale.

Et nous finirons comme cette vieille, oubliés. Poussières, nous retournerons à la poussière.

Texte : Le Gibi

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Ce billet a été rédigé par le Gibi du blog lignes de vie que je reçois aujourd’hui dans le cadre des vases communicants. Vous pouvez suivre ce chemin pour aller lire mon billet publié chez lui.

Les autres participants aux vases communicants :
Frédérique Martin
et Désordonnée
Anna de Sandre et Tor-ups
Tiers libre et la vie dangereuse
A Chat perché et Mahigan Lepage
C’était demain et Petite racine
Les lignes du monde et Paumée
36 poses et Arnaud Maisetti
Zoé lucider et Sophie K
gammalphabets et aedificavit
(que les oubliés se manifestent)

Vases communicants sur twitter


  • 2.10.09