Le miroir des autres 30

28.12.22

Fragmentaires et apparaissant au gré de mes pensées confuses et hésitantes, de la combinaison des fils emmêlés dans mon cervelet, soumises aussi à mes tentations vachardes ou goguenardes, à ma folie souterraine, à mes marécages de nuit ou même sous l’influence inconsciente de mes dernières lectures ou encore, va savoir, d’un atavisme par essence incontrôlable, les histoires qui se déroulent dans le miroir de la salle de bains sont devenues un sacré bazar.

Dernièrement, j’ai tué un autre : Arsène. Soit. Ce n’est pas bien mais ça a l’avantage d’être clair. Puisque je suis le réalisateur et le narrateur, il faut que je mette un peu d’ordre dans le miroir et chez les autres personnages restants, et par la même occasion dans ma tête. J’ai donc au-dessus du lavabo les reflets de : 
- Philémon le roi déchu, à la longue barbe grise qui sent mauvais. Enfin, le miroir ne me délivre pas d’odeurs mais je suppose que son hygiène n’est pas optimale. Un comble pour quelqu’un vivant dans une salle de bains.
- Fleurine, la marchande de cartes, papiers et autres jolies reliures. Une papetière propre sur elle, la trentaine qui regarde souvent dans la vitrine, vaporeuse et rêveuse. J’imagine qu’elle sent bon. 
- Cunégonde, Arthémise et Conception en cours de dévoilement chargent leurs visages dans le miroir depuis deux jours. Au dernier relevé, elles en étaient à 75%. J’en saurai plus sur elles dans quelques heures. Quant à leur odeur, quelle importance ?

Bien. Pas de quoi en faire un roman ! Je me rassemble devant le miroir et décide unilatéralement d’attendre l’éclosion des trois susnommées pour envisager la poursuite du « miroir des autres ». Restez dans ma salle de bains.

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