Chère application - 9 juin

9.6.22

Chère application,

Jeudi 9 juin. Le jour a déjà mis ses habits propres. Je me lève avec le brouillon d’un texte dans la tête qui, lui, porte toujours les guenilles de la nuit. Il ne verra pas le jour.
J’ai des maux de ventre depuis quelques jours. Difficile de penser à autre chose dans ces cas-là.
- Stop ! Tu vas quand même pas nous parler de tes problèmes gastriques ?
- Tu as raison, chère application, ce n’est pas très intéressant. 
- C’est dégoûtant, oui ! Reviens sur ton texte en guenille, plutôt.
Il s’agissait d’une histoire complète. Elle était claire, bien ficelée. Il n’y avait plus qu’à l’écrire. Mais plus la nuit avançait, plus le texte se décomposait. Je visualisais même les phrases, les mots puis les lettres se sont échappées une à une de la page, sont tombées dans un trou sans fond. Et ce matin, plus rien, juste un vague souvenir et la frustration. Rien n’est sorti. 
- Tu parles encore de tes problèmes là !
- Mais non !
- Mais si ! 

Jeudi 9 juin. Je regarde par la fenêtre. La lumière vacille. Le jour porte beau mais hésite à vraiment y aller. Il semble tourner avec des pensées contrariées comme s’il était malmené par un immense doute. C’est un jour déjà vieux. Un de ceux à qui on ne la fait pas. Il sait très bien. Il a de l’expérience mais aussi la lassitude des recommencements. Je crois aussi qu’il a un peu mal au ventre. 

Jeudi 9 juin. 
Contre-jour, une ombre 
passe sur le mur d’en face. 
Un vieux doute revient puis
disparaît en serrant les dents. 

À demain, chère application.

Dans le même tiroir