Aux quatre vents
27.2.18
Une tasse ébréchée entre deux grands containers. De la porcelaine fine d’un autre âge. Sur le bord, une coulée de marc de café fait de la résistance. Utilisée une dernière fois puis jetée là, la tasse verse une dernière larme noire, cache sa peine d’être ainsi abandonnée à la rue. Que de petits doigts hautains levés au-dessus d’elle tandis que d’autres angoissés entouraient fermement son anse. Que de paroles déterminantes ou de regards d’ennuis échangés après le fromage et avant la poire. Que de repas terminés sur la toile cirée, partageant avec la soucoupe bâillements et battements de paupières. Que de lendemains de fête difficiles, encore ivre des débordements de pousse-cafés. Que de mains affairées à nettoyer les traces de rouge à lèvres, le sucre cristallisé dans son fond, le résidu sec d’un café mal passé. Que de matins clairs dans le vaisselier, toujours surprise de renaître aujourd’hui aussi fragile qu’hier. Pour finalement finir ici, aux quatre vents écorchée, à chercher sa place entre la poubelle verte et la poubelle jaune.